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LE BLOG TOTEMS DE CHRISTIAN VANCAU


 


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Site traduit en Allemand :

http://fp.reverso.net/christianvancautotems/3733/de/index.html

 

Site traduit en Anglais :

http://fp.reverso.net/christianvancautotems/3733/en/index.html


Sur cette photo, Christian Vancau dans son jardin avec quelques uns de ses totems et sa guitare à la main


Présentation

  • : le blog totems par : Christian VANCAU
  • : Il s'agit de la réflexion d'un peintre de 78 ans, au départ d'un territoire peint et sculpté par lui, au coeur de l'Ardenne et dans lequel il vit en solitaire, tout en y accueillant de nombreux visiteurs!
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Profil

  • Christian VANCAU
  • Journal quotidien d'un peintre de 81 ans qui a créé un territoire naturel et artistique au centre le forêt ardennaise belge. Aussi écrivain, musicien et photographe, sans compter le jardinage 6 mois par an. Et voyageur... et adorant les animaux.
  • Journal quotidien d'un peintre de 81 ans qui a créé un territoire naturel et artistique au centre le forêt ardennaise belge. Aussi écrivain, musicien et photographe, sans compter le jardinage 6 mois par an. Et voyageur... et adorant les animaux.

Carte mondiale des Blogueurs

J'habite dans le Sud de la Belgique, à 10 Kms au Nord de Libramont, 50 Kms au Nord  de Sedan et 75 Kms au Nord de Longwy. Sur cette carte, la Belgique au Nord de la France et au Sud, une flèche noire indiquant mon village, situé au Nord de LibramontUne autre perspective. Moircy encadré, Bastogne 30 Kms Nord-Est, Luxembourg- ville au Sud-Est, Carte-Prov.Lux2-jpgSedan et Carte-Prov.Lux-jpgCharleville au Sud-Ouest

Recherche

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Mon adresse-mail est la suivante:  christian.vancau@base.be


" C'est d'abord un combat contre les parents et ensuite un combat contre les maîtres qu'il faut mener et gagner, et mener et gagner avec la brutalité la plus impitoyable, si le jeune être humain ne veut pas être contraint à l'abandon par les parents et par les maîtres, et par là, être détruit et anéanti "
( Thomas Bernhard, écrivain autrichien décédé en 1989 )

Ma biographie c'est ce combat et rien d'autre




Je suis un homme de 74 ans retiré dans un tout petit village des ardennes belges,  un endroit magnifique au bord de la forêt. J'y vis seul . J'ai une fille de 46 ans et deux petit-fils de 21 et 6 ans, qui vivent tous les trois à 10 Kms de chez moi.. Je suis donc un homme d'avant-guerre (1937), né à Gand en Flandre, de père gantois et de mère liégeoise (Gand et Liège sont les deux villes rebelles de Belgique ). Je suis arrivé à Liège en 1940 avec ma mère et ma soeur, alors que mon père s'était embarqué pour l'Angleterre, dans l'armée belge et y exerçait son métier de chirurgien orthopédiste. Je n'ai donc réellement rencontré mon père qu'à l'âge de 8 ans, après la guerre, en 1945. Mis à part 2 années à Bruxelles et une année en Suisse à Saint-Moritz, j'ai vécu à Liège et y ai fait toutes mes études, humanités gréco-latines chez les Jésuites et Droit à l'Université de Liège. Je me suis marié en 1962, ai eu une petite fille Valérie et ai cherché une situation, muni de mon diplôme de Docteur en Droit. J'ai trouvé un emploi dans la banque. Je n'aimais ni le Droit ni la banque, je ne me savais pas encore artiste, je voulais être journaliste. Ma famille bourgeoise m'avait dit "Fais d'abord ton droit" !  En 1966, j'ai commencé une psychanalyse qui a duré 5 anset demi. En 1967, j'ai commencé à peindre. En 1971, ma Banque m'a envoyé créer un réseau d'agences dans le Sud de la Belgique, ce que j'avais déjà fait dans la province de Liège. Je me suis donc retrouvé en permanence sur les routes explorant village après village, formant les agents recrutés et les faisant "produire". Il ne m'aurait jamais été possible d'être un banquier enfermé. Je ne tiens pas en place. Pendant 8 ans j'ai vécu au-dessus de ma banque à Libramont, créant mon réseau. En 1975, j'ai été nommé Directeur et Fondé de Pouvoirs. En 1978 j'ai acheté une maison en ruines à Moircy, mon territoire actuel. Je l'ai restaurée et y suis entré en 1979. En 1980, ma banque a été absorbée par une banque plus puissante et l'enfer a commencé. En 1983, mon bureau a été fermé. Je suis devenu Inspecteur, puis Audit en 1985 avec un réseau de 140 agences couvrant tout le Sud et l'Est de la Belgique. Dans le même temps je transformais mon territoire, creusais des étangs, installais plantations et totems et peignais abondamment. En 1989, j'étais "liquidé" par ma Banque avec beaucoup d'autres, pour des raisons économiques. Ma femme est partie.Je me suis retrouvé libre avec 28 mois de préavis et puis ensuite chômeur. Mais j'ai  intenté un procés à ma Banque. Ca a duré 4 ans et j'ai gagné. Quelle jouissance de pouvoir écraser une banque (à suivre)
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Archives

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J'ai commençé à exposer en 1976 et celà a duré jusqu'en 1995, le temps de réaliser que le monde de l'Art  n'était pas plus reluisant que celui de la Banque. Je n'avais en outre, nul besoin de vendre et encore moins d'être célèbre. A chercher l'argent et la gloire, on est sûrs de perdre son âme, tôt ou tard (et de toutes façons, la réputation monte quand le cercueil descend ). J'ai donc quitté les mileux de l'art. J'ai encore peint jusqu'en 2002. Celà aura tout de même fait 35 ans. Je n'ai plus besoin de la peinture. Elle m'a permis de survivre psychologiquement et de me chercher. Pour moi l'Art est ce qui doit rendre la Vie plus belle que l'Art
Je suis un HOMME LIBRE, un sauvage, proche de la nature et des animaux, misanthrope, profondément rebelle, tout d'une pièce, physique, violent contrôlé à savoir positif dans ma violence, agnostique. Je ne crois absolument pas à l'avenir de l'Humanité. L'Homme est indécrottable. Il est UN LOUP pour l'Homme. Aucune leçon de l'Histoire ne lui a servi
Je ne crois pas à la politique. J'ai le coeur à gauche, instinctivement du côté des défavorisés, contre toute exploitation et abus de pouvoir, contre tout racisme, mais je ne suis pas de gauche, ça ne veut plus rien dire ! Et encore moins de droite, celà va de soi !
Je pense que si l'homme n'arrive pas à créer le bonheur dans sa vie personnelle intérieure, il est incapable de le créer pour les autres. La meilleure chose que l'on puisse faire pour les autres est d'être heureux soi-même !
Je préfère nettement les femmes aux hommes. Je me sens de leur sensibilité, je m'efforce de faire fleurir les mêmes valeurs qu'elles
Je pense que réussir sa vie, c'est réussir l'amour. Toutes les autres formes de "réussite", sont des ersatz qui ne "comblent "pas
Je suis né un 1er Novembre, suis donc Scorpion, Ascendant Gemeaux, Milieu du Ciel en Verseau, Mercure en Scorpion comme le Soleil, Mars et Jupiter en Capricorne, Saturne en Poissons, Uranus en Taureau, Neptune en Vierge, Pluton en Lion, Vénus en Balance, ainsi que la Lune, j'ai mes Noeuds lunaires ( sens de ma vie, mon destin ici bas ) et Lilith (la lune noire) en Sagittaire. Du Scorpion, j'ai l'agressivité, le côté piquant, le côté rebelle. Du Gemeaux, j'ai le goût des langues , de l'écriture, des voyages, et l'incapacité à rentrer dans des hiérarchies ou dans des groupes,
quels qu'ils soient, et à me soumettre à une autorité
Dans mes jeunes années j'ai pratiqué beaucoup de sports: tennis, natation, cyclisme, ping-pong, ski, boxe et karaté. Aujourd'hui toute mon activité physique est concentrée sur les travaux d'entretien de mon territoire. Je suis jardinier 6 mois par an.
En dehors de la peinture, je pratique d'autres activités: 1) Lecture (romans, polars compris, poésie, théâtre, ouvrages de philosophie et de psychologie, mythologies etc..) 2) Ecriture (Un journal quotidien depuis 1980, comptant à ce jour 45.000 pages ), 3) Musique (Guitare et piano). Toutes les musiques m'intéressent, blues, jazz, rock, chanson française, musique classique et contemporaine. 4) Photo et Video. 5)Jardinage et rapport constant avec le monde animal. 6)Et enfin l'informatique, activité nouvelle que je pratique depuis3 ans et qui a abouti à la création de ce blog

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Christian VANCAU

28 janvier 2016 4 28 /01 /janvier /2016 09:22
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie

Honoré de Balzac, né Honoré Balzac à Tours le 20 mai 1799 (1er prairial an VII du calendrier républicain), et mort à Paris le 18 août 1850 (à 51 ans), est un écrivain français. Romancier, dramaturge, critique littéraire, critique d'art, essayiste, journaliste et imprimeur, il a laissé l'une des plus imposantes œuvres romanesques de la littérature française, avec plus de quatre-vingt-dix romans et nouvelles parus de 1829 à 1855, réunis sous le titre La Comédie humaine. À cela s'ajoutent Les Cent Contes drolatiques, ainsi que des romans de jeunesse publiés sous des pseudonymes et quelque vingt-cinq œuvres ébauchées.

 

Il est un maître du roman français, dont il a abordé plusieurs genres, du roman philosophique avec Le Chef-d'œuvre inconnu au roman fantastique avec La Peau de chagrin ou encore au roman poétique avec Le Lys dans la vallée. Il a surtout excellé dans la veine du réalisme, avec notamment Le Père Goriot et Eugénie Grandet, mais il s'agit d'un réalisme visionnaire, que transcende la puissance de son imagination créatrice.

Comme il l'explique dans son Avant-Propos à La Comédie humaine, il a pour projet d'identifier les « Espèces sociales » de son époque, tout comme Buffon avait identifié les espèces zoologiques. Ayant découvert par ses lectures de Walter Scott que le roman pouvait atteindre à une « valeur philosophique », il veut explorer les différentes classes sociales et les individus qui les composent, afin « d'écrire l’histoire oubliée par tant d’historiens, celle des mœurs » et « faire concurrence à l'état civil ».

 

L'auteur décrit la montée du capitalisme et l'absorption par la bourgeoisie d'une noblesse incapable de s'adapter aux réalités nouvelles. Intéressé par les êtres qui ont un destin, il crée des personnages plus grands que nature, au point qu'on a pu dire que, dans ses romans, « chacun, même les portières, a du génie ».

 

Ses opinions politiques sont ambiguës : s’il affiche des convictions légitimistes en pleine Monarchie de Juillet, il s’est auparavant déclaré libéral, et défendra les ouvriers en 1840 et en 1848, même s'il ne leur accorde aucune place dans ses romans. Tout en professant des idées conservatrices, il a produit une œuvre admirée par Marx et Engels, et qui invite par certains aspects à l'anarchisme et à la révolte.

 

Outre sa production littéraire, il écrit des articles dans les journaux et dirige successivement deux revues, qui feront faillite. Convaincu de la haute mission de l'écrivain, qui doit régner par la pensée, il lutte pour le respect des droits d'auteur et contribue à la fondation de la Société des gens de lettres.

 

Travailleur forcené, fragilisant par ses excès une santé précaire, endetté à la suite d'investissements hasardeux et de dépenses somptuaires, fuyant ses créanciers sous de faux noms dans différentes demeures, Balzac a aussi eu de nombreuses liaisons féminines avant d'épouser, en 1850, la comtesse Hańska, qu'il avait courtisée pendant dix-sept ans. Comme l’argent qu’il gagnait avec sa plume ne suffisait pas à payer ses dettes, il avait sans cesse en tête des projets mirobolants : une imprimerie, un journal, une mine d'argent. C’est dans un palais situé rue Fortunée qu’il meurt profondément endetté au milieu d’un luxe inouï.

 

Lu et admiré dans toute l'Europe, Balzac a fortement influencé les écrivains de son temps et du siècle suivant. Le roman L'Éducation sentimentale de Gustave Flaubert est directement inspiré du Lys dans la vallée, et Madame Bovary, de La Femme de trente ans. Le principe du retour de personnages évoluant et se transformant au sein d'un vaste cycle romanesque a notamment inspiré Émile Zola et Marcel Proust. Ses œuvres continuent d'être rééditées. Le cinéma a adapté La Marâtre dès 1906 ; depuis, les adaptations cinématographiques et télévisuelles de cette œuvre immense se sont multipliées, avec plus d'une centaine de films et téléfilms produits à travers le monde.

Sommaire

Biographie

Enfance et années de formation
Paysage d'hiver, arbres partiellement dénudés, avec une église gothique, chœur avec arcs-boutants toit en ardoise, surmontée d'une flèche pointue recouverte aussi d'ardoises, et un clocher conique en pierre ; au premier plan un bassin d'eau verte
 
La Trinité et le clocher St Martin de Vendôme.

Honoré de Balzac est le fils de Bernard-François Balssa, secrétaire au conseil du Roi, directeur des vivres, maire adjoint et administrateur de l’hospice de Tours, et d'Anne-Charlotte-Laure Sallambier, issue d'une famille de passementiers du Marais. Bernard-François Balssa transforma le nom originel de la famille en Balzac, par une démarche faite à Paris entre 1771 et 1783, soit avant la Révolution. Bernard-François avait trente-deux ans de plus que sa femme, qu'il a épousée en 1797, alors qu'elle n'avait que 18 ans. Il est athée et voltairien, tandis qu'elle est décrite comme « une mère mondaine et amorale », qui s'intéresse aux magnétiseurs et aux illuministes.

 

Né le 20 mai 1799, Honoré est mis en nourrice immédiatement et ne regagnera la maison familiale qu'au début de 1803. Cet épisode de la première enfance lui donnera le sentiment d'avoir été délaissé par sa mère, tout comme le sera le personnage de Félix de Vandenesse, son « double » du Lys dans la vallée. Il est l’aîné des quatre enfants du couple (Laure, Laurence et Henry). Sa sœur Laure, de seize mois sa cadette, est de loin sa préférée : il y a entre eux une complicité et une affection réciproque qui ne se démentiront jamais. Elle lui apportera son soutien à de nombreuses reprises : elle écrit avec lui, et publiera la biographie de son frère en 1858.

 

De 1807 à 1813, Honoré est pensionnaire au collège des oratoriens de Vendôme. Au cours des six ans qu'il y passe, sans jamais rentrer chez lui, même pour les vacances, le jeune Balzac dévore des livres de tout genre : la lecture était devenue pour lui « une espèce de faim que rien ne pouvait assouvir [...] son œil embrassait sept à huit lignes d'un coup et son esprit en appréciait le sens avec une vélocité pareille à celle de son esprit. » Cependant, ces lectures, qui meublent son esprit et développent son imagination, ont pour effet d'induire chez lui une espèce de coma dû à « une congestion d'idées ». La situation s'aggrave au point que, en avril 1813, les oratoriens s'inquiètent pour sa santé et le renvoient dans sa famille, fortement amaigri.

 

De juillet à novembre 1814, il est externe au collège de Tours. Son père ayant été nommé directeur des vivres pour la Première division militaire, la famille déménage à Paris et s’installe au 40, rue du Temple, dans le quartier du Marais. L'adolescent est admis comme interne à la pension Lepître, située rue de Turenne à Paris, puis en 1815 à l’institution de l’abbé Ganser, rue de Thorigny. Les élèves de ces deux institutions suivent en fait les cours du lycée Charlemagne, où se trouve aussi Jules Michelet, dont les résultats scolaires sont toutefois plus brillants que les siens.

 

Le 4 novembre 1816, le jeune Balzac s’inscrit en droit. En même temps, il prend des leçons particulières et suit des cours à la Sorbonne. Il fréquente aussi le Muséum d'Histoire naturelle, où il s'intéresse aux théories de Cuvier et de Geoffroy Saint-Hilaire.

 

Son père tenant à ce qu'il associe la pratique à la théorie, Honoré doit, en plus de ses études, travailler chez un avoué, ami de la famille, Jean-Baptiste Guillonnet-Merville, homme cultivé qui avait le goût des lettres. Il exerce le métier de clerc de notaire dans cette étude où Jules Janin était déjà « saute-ruisseau». Il utilisera cette expérience pour restituer l’ambiance chahuteuse d’une étude d’avoué dans Le Colonel Chabert et créer les personnages de Maître Derville et d'Oscar Husson dans Un début dans la vie. Une plaque, rue du Temple à Paris, atteste son passage chez cet avoué, dans un immeuble du quartier du Marais. En même temps, il dévore, résume et compare quantité d'ouvrages de philosophie, signe de ses préoccupations métaphysiques et de sa volonté de comprendre le monde. Il passe avec succès le premier examen du baccalauréat en droit le 4 janvier 1819, mais ne se présentera pas au deuxième examen et ne poursuivra pas jusqu'à la licence.

L'écrivain débutant
Article détaillé : Œuvres de jeunesse de Balzac.
Dessin représentant un homme jeune en chemise blanche, col ouvert, cheveux noirs hirsutes
 
Portrait d’Honoré de Balzac vers 1825, attribué à Achille Devéria.

 

Son père alors âgé de 73 ans ayant été mis à la retraite, la famille n'a plus les moyens de vivre à Paris et déménage à Villeparisis. Le jeune Balzac ne veut pas quitter Paris et dit vouloir se consacrer à la littérature. Ses parents le logent alors, en août 1819, dans une mansarde, au 9, rue de Lesdiguières, et lui laissent deux ans pour écrire. Balzac rappellera dans Illusions perdues cette période de sa vie. Dans Facino Cane, il mentionne même le nom de la rue et évoque le plaisir qu'il prenait à s'imaginer la vie des autres :

« En entendant ces gens, je pouvais épouser leur vie, je me sentais leurs guenilles sur le dos, je marchais les pieds dans leurs souliers percés ; leurs désirs, leurs besoins, tout passait dans mon âme, ou mon âme passait dans la leur. C’était le rêve d’un homme éveillé. Je m’échauffais avec eux contre les chefs d’atelier qui les tyrannisaient, ou contre les mauvaises pratiques qui les faisaient revenir plusieurs fois sans les payer. Quitter ses habitudes, devenir un autre que soi par l’ivresse des facultés morales, et jouer ce jeu à volonté, telle était ma distraction. À quoi dois-je ce don ? Est-ce une seconde vue ? est-ce une de ces qualités dont l’abus mènerait à la folie ? Je n’ai jamais recherché les causes de cette puissance ; je la possède et m’en sers, voilà tout. »

 

Il travaille à un projet de Discours sur l'immortalité de l'âme, lit Malebranche, Descartes et entreprend de traduire Spinoza du latin au français. En même temps, il se lance en littérature et, prenant son inspiration dans un personnage de Shakespeare, rédige une tragédie de 1 906 alexandrins, Cromwell (1820). Lorsqu'il présente cette pièce à ses proches, l'accueil se révèle décevant. Consulté, l'académicien François Andrieux le décourage de poursuivre dans cette voie.

 

Le jeune homme s’oriente alors vers le roman historique dans la veine de Walter Scott, dont la traduction d'Ivanhoé, parue en avril 1820, rencontre en France un immense succès. Sous le titre Œuvres de l'abbé Savonati, il réunit d'abord deux textes, Agathise (entièrement disparu) et Falthurne, récit « dont l'action se situait dans l'Italie vers le temps de Canossa (...), attribué à un abbé imaginaire, Savonati, et « traduit » de l'italien par M. Matricante, instituteur primaire. » Dans un autre texte, Corsino, il imagine un jeune Provençal, nommé Nehoro (anagramme d'Honoré) qui rencontre dans un château écossais un Italien avec lequel il discute de métaphysique. Ces ébauches sont vite abandonnées et ne seront pas publiées de son vivant. Il en va de même de Sténie ou les Erreurs philosophiques, un roman par lettres esquissé l'année précédente et qui s'inspire de La Nouvelle Héloïse

 
Outre Walter Scott, il lit les romans gothiques de l'Irlandais Charles Robert Maturin dont il s'inspire dans La Dernière fée (1823).

 

En 1821, Balzac s'associe avec Étienne Arago et Lepoitevin pour produire ce qu'il appelle lui-même de « petites opérations de littérature marchande ». Soucieux de ne pas salir son nom par une production qu'il qualifie lui-même de « cochonneries littéraires », il publie sous le pseudonyme de Lord R’hoone (autre anagramme d'Honoré). Parmi ces œuvres, on compte notamment : L'Héritière de Birague, Clotilde de Lusignan, Le Vicaire des Ardennes (interdit et saisi, mais c'est le seul roman de cette époque qui ait échappé à l'échec commercial) et Jean-Louis. Ces ouvrages en petit format in-12 rencontrent un certain public dans les cabinets de lecture, si bien que l'auteur croit avoir trouvé un filon productif. Dans une lettre à sa sœur Laure, datée de juillet 1821, il se fait fort de produire un roman par mois : « Dans peu, Lord R'hoone sera l'homme à la mode, l'auteur le plus fécond, le plus aimable, et les dames l'aimeront comme la prunelle de leurs yeux, et le reste ; et alors, le petit brisquet d'Honoré arrivera en équipage, la tête haute, le regard fier et le gousset plein. ». En fait, il dépasse même cet objectif, car il déclare un peu plus tard avoir écrit huit volumes en trois mois. De cette période date notamment L'Anonyme, ou, Ni père ni mère signé sous le double pseudonyme de son commanditaire A. Viellerglé Saint Alme et Auguste Le Poitevin de L'Égreville.

 

En 1822, il abandonne ce pseudonyme pour celui de Horace de Saint-Aubin. C'est celui qu'il utilise pour signer Le Centenaire ou les Deux Beringheld et Le Vicaire des Ardennes. Ce dernier ouvrage est dénoncé au Roi et saisi. En 1823, il publie Annette et le Criminel, puis La dernière Fée ou La Nouvelle Lampe merveilleuse, mais ce livre, mauvais pastiche d'un vaudeville de Scribe et d'un roman de Maturin, est « exécrable ».

 
Balzac, Clotilde de Lusignan (1822)
 
Couverture de Wann-Chlore, 1825

 

Il collabore au Feuilleton littéraire, qui cessera de paraître le 7 septembre 1824, et rédige divers ouvrages utilitaires répondant à la demande du public. Après un Code de la toilette (1824), il publie un Code des gens honnêtes dans lequel il affirme avec cynisme que tout l'état social repose sur le vol et qu'il faut donc donner aux gens honnêtes les moyens de se défendre contre les ruses des avocats, avoués et notaires24. Il travaille aussi à un Traité de la Prière et publie une Histoire impartiale des Jésuites (1824). Il rédige aussi sous pseudonyme un ouvrage sur Le Droit d'aînesse (1824), sujet qui sera chez lui un thème récurrent. Son père, qui avait mis la main sur cette brochure anonyme, s'indigna contre un « auteur arriéré » défenseur d'une institution périmée et entreprit de le réfuter, ignorant qu'il s'agissait de son fils.

 

Vers la fin de l'année 1824, en proie à une profonde crise morale et intellectuelle, Balzac abandonne la littérature commerciale et rédige le testament littéraire de Horace de Saint-Aubin, qu'il place dans la postface de Wann-Chlore ou Jane la Pâle. Il se moquera plus tard des intrigues sommaires et dépourvues de style des romans de cette époque, et en fera un pastiche désopilant dans un long passage de La Muse du département. Il se met alors à la rédaction de L'Excommunié, roman de transition achevé par une main étrangère et qui ne sera publié qu'en 1837. Cet ouvrage consomme sa rupture avec la littérature facile et sera le premier jalon d'un cycle de romans historiques. Féru d'histoire, Balzac aura alors l'idée de présenter l'histoire de France sous une forme romanesque, ce qui donnera notamment Sur Catherine de Médicis. Il s'essaie aussi une nouvelle fois au théâtre, avec Le Nègre, un sombre mélo, tout en étant conscient de gaspiller son génie et esquisse un poème en vers qui n'aboutira pas : Fœdora.

 

En dépit de leurs défauts, ces œuvres de jeunesse, publiées de 1822 à 1827, contiennent selon André Maurois les germes de ses futurs romans : « Il sera un génie malgré lui ». Balzac, toutefois, les désavoue et les proscrira de l’édition de ses œuvres complètes8, tout en les republiant en 1837 sous le titre Œuvres complètes de Horace de Saint-Aubin, et en faisant compléter certains ouvrages par des collaborateurs, notamment le comte de Belloy et le comte de Grammont. Pour mieux brouiller les pistes et couper tout lien avec son pseudonyme, il chargera Jules Sandeau de rédiger un ouvrage intitulé Vie et malheurs de Horace de Saint-Aubin.

 

Désespérant de devenir riche avec une littérature alimentaire qu'il méprise, il décide de se lancer dans les affaires et devient libraire-éditeur. Le 19 avril 1825, il s’associe à Urbain Canel et Delongchamps pour publier des éditions illustrées de Molière et de La Fontaine. Il acquiert aussi une partie du matériel de l'ancienne fonderie Gillé & Fils et fonde une imprimerie. Toutefois, les livres ne se vendent pas aussi bien qu'il le souhaitait et la faillite menace. Lâché par ses associés, Balzac se retrouve, le 1er mai 1826, avec une énorme dette. Au lieu de jeter l'éponge, il pousse plus loin l'intégration verticale et décide, le 15 août 1827, de créer une fonderie de caractères avec le typographe André Barbier. Cette affaire se révèle également un échec financier. Au 16 avril 1827, il croule sous une dette dont le chiffre varie selon les sources de 53 619 francs, à 60 000 francs de l'époque.

Vers une nouvelle forme de roman
Couverture en noir et blanc d'un livre sans illustration sur lequel est écrit : Le dernier chouan ou la Bretagne en 1800, par Honoré de Balzac.
 
Couverture de la première édition des Chouans. 1829. (Source « Gallica »).
Portrait peint d'une femme aux cheveux bruns, longs et bouclés, elle porte une étole blanche sur une chemise blanche en croisant les bras.
 
Fortunée Hamelin, une merveilleuse dont Balzac fréquentait le salon. Portrait par Andrea Appiani (1798).
Couverture d'un livre en noir et blanc portant le titre Œuvres complètes de Walter Scott et illustré par un soldat du XIXe siècle assis
 
Couverture d'une traduction des Œuvres complètes de Walter Scott. 1826. (Source : « Gallica »).

 

Passionné par les idées et les théories explicatives, Balzac s'intéresse aux écrits de Swedenborg, ainsi qu'au martinisme et aux sciences occultes. Convaincu de la puissance de la volonté, il croit que l'homme « a le pouvoir d'agir sur sa propre force vitale et de la projeter hors de soi-même, pratiquant occasionnellement le magnétisme curatif, comme sa mère, par l'imposition des mains ». Il connaît par expérience la force que recèle le roman, mais ne voit pas encore celui-ci comme un outil de transformation sociale. Ainsi écrit-il dans une préface : « Ah ! si j'étais une fois conseiller d'État, comme je dirais au roi, et en face encore : « Sire, faites une bonne ordonnance qui enjoigne à tout le monde de lire des romans !...» En effet, c'est un conseil machiavélique, car c'est comme la queue du chien d'Alcibiade ; pendant qu'on lirait des romans, on ne s'occuperait pas de politique. »

 

Il perçoit maintenant les limites de Walter Scott, un modèle jadis fort admiré et à qui il rendra encore hommage dans son Avant-Propos de 1842. Comme le déclarera plus tard un de ses personnages dans un avertissement lancé à un jeune écrivain : « Si vous voulez ne pas être le singe de Walter Scott, il faut vous créer une manière différente. »

 

S'il peut envisager la possibilité de dépasser son modèle, c'est aussi parce qu'il a découvert, en 1822, L’Art de connaître les hommes par la physionomie de Lavater et qu'il en est fortement imprégné. La physiognomonie, qui se flatte de pouvoir associer « scientifiquement » des traits de caractère à des caractéristiques physiques, et qui recense quelque 6 000 types humains, devient pour lui une sorte de Bible. Cette théorie contient en effet en germe « l'esquisse d'une étude de tous les groupes sociaux ». Le romancier aura souvent recours à cette théorie pour dresser le portrait de ses personnages :

« Les lois de la physionomie sont exactes, non seulement dans leur application au caractère, mais encore relativement à la fatalité de l’existence. Il y a des physionomies prophétiques. S’il était possible, et cette statistique vivante importe à la Société, d’avoir un dessin exact de ceux qui périssent sur l’échafaud, la science de Lavater et celle de Gall prouveraient invinciblement qu’il y avait dans la tête de tous ces gens, même chez les innocents, des signes étranges. »

 

D'une vieille fille méchante et bornée, il écrit ainsi que « la forme plate de son front trahissait l'étroitesse de son esprit. » Pour un criminel : « Un trait de sa physionomie confirmait une assertion de Lavater sur les gens destinés au meurtre, il avait les dents de devant croisées. » Ailleurs, il décrit ainsi un banquier : « L’habitude des décisions rapides se voyait dans la manière dont les sourcils étaient rehaussés vers chaque lobe du front. Quoique sérieuse et serrée, la bouche annonçait une bonté cachée, une âme excellente, enfouie sous les affaires, étouffée peut-être, mais qui pouvait renaître au contact d’une femme. »

 

Après sa faillite comme éditeur, Balzac revient à l’écriture. En septembre 1828, cherchant la sérénité et la documentation nécessaires à la rédaction des Chouans, roman politico-militaire, il obtient d'être hébergé par le général Pommereul à Fougères. Il polit particulièrement cet ouvrage, car il veut le faire éditer en format in-octavo, beaucoup plus prestigieux que le format in-12 de ses livres précédents destinés aux cabinets de lecture. Le roman paraît finalement en 1829 sous le titre Le Dernier Chouan ou la Bretagne. C'est le premier de ses ouvrages à être signé « Honoré Balzac ».

 

Cette même année 1829 voit la parution de Physiologie du mariage « par un jeune célibataire ». Balzac y montre une « étonnante connaissance des femmes », qu'il doit sans doute aux confidences de ses amantes, Mme de Berny et la duchesse d'Abrantès, ainsi qu'à Fortunée Hamelin et Sophie Gay, des « merveilleuses » dont il fréquente les salons. Décrivant le mariage comme un combat, l'auteur prend le parti des femmes et défend le principe de l'égalité des sexes, alors mis de l'avant par les saint-simoniens. L'ouvrage remporte un grand succès auprès des femmes, qui s'arrachent le livre, même si certaines le trouvent choquant.

 

Balzac commence dès lors à être un auteur connu. Il est introduit au salon de Juliette Récamier, où se retrouve le gratin littéraire et artistique de l'époque. Il fréquente aussi le salon de la princesse russe Catherine Bagration, où il se lie notamment avec le duc de Fitz-James, oncle de Mme de Castries. Toutefois, ses livres ne se vendent pas assez : ses revenus ne sont pas à la hauteur de ses ambitions et de son train de vie. Il cherche alors à gagner de l'argent dans le journalisme.

 

En 1830, il écrit dans la Revue de Paris, la Revue des deux Mondes, La Mode, La Silhouette, Le Voleur, La Caricature. Il devient l'ami du patron de presse Émile de Girardin. Deux ans après la mort de son père, l'écrivain ajoute une particule à son nom lors de la publication de L'Auberge rouge, en 1831, qu'il signe de Balzac. Ses textes journalistiques sont d'une grande diversité. Certains portent sur ce qu'on appellerait aujourd'hui la politique culturelle, tels « De l'état actuel de la librairie » et « Des artistes ». Ailleurs est esquissée une « Galerie physiologique », avec « L'épicier » et « Le Charlatan ». Il écrit aussi sur les mots à la mode, la mode en littérature et esquisse une nouvelle théorie du déjeuner. Il publie en parallèle des contes fantastiques et se met à écrire sous forme de lettres des réflexions sur la politique.

 

En même temps, il travaille à La Peau de chagrin, qu'il voit comme « une véritable niaiserie en fait de littérature, mais où il a essayé de transporter quelques situations de cette vie cruelle par laquelle les hommes de génie ont passé avant d'arriver à quelque chose ». D'inspiration romantique par son intrigue, qui fait « se dérouler dans le Paris de 1830 un conte oriental des mille et une nuits », le conte explore l'opposition entre une vie fulgurante consumée par le désir, et la longévité morne que donne le renoncement à toute forme de désir. Son héros, Raphaël de Valentin, s'exprime comme l'auteur lui-même, qui veut tout : la gloire, la richesse, les femmes :

« Méconnu par les femmes, je me souviens de les avoir observées avec la sagacité de l’amour dédaigné. (...) Je voulus me venger de la société, je voulus posséder l’âme de toutes les femmes en me soumettant les intelligences, et voir tous les regards fixés sur moi quand mon nom serait prononcé par un valet à la porte d’un salon. Je m’instituai grand homme. »

 

Balzac dira plus tard de ce roman qu'il est « la clé de voûte qui relie les études de mœurs aux études philosophiques par l'anneau d’une fantaisie presque orientale où la vie elle-même est prise avec le Désir, principe de toute passion ».

 

Dans la préface de l'édition de 1831, il expose son esthétique réaliste : « L'art littéraire ayant pour objet de reproduire la nature par la pensée est le plus compliqué de tous les arts. [...] L'écrivain doit être familiarisé avec tous les effets, toutes les natures. Il est obligé d'avoir en lui je ne sais quel miroir concentrique où, suivant sa fantaisie, l'univers vient se réfléchi. » Ce livre — qu'il dédie à la Dilecta — paraîtra finalement en 1831. C'est un succès immédiat. Balzac est devenu « avec trois ouvrages, l'ambition des éditeurs, l'enfant chéri des libraires, l'auteur favori des femmes

Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
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Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Gravure d'un homme préoccupé vu de profil, il est assis sur une chaise les mains croisées posées sur ses jambes croisées.
 
Le père Goriot par Daumier (1842). Ce roman inaugure le retour des personnages.

La Peau de chagrin marque le début d'une période créative au cours de laquelle prennent forme les grandes lignes de La Comédie humaine. Les « études philosophiques », qu’il définit comme la clé permettant de comprendre l’ensemble de son œuvre, ont pour base cet ouvrage, qui sera suivi de Louis Lambert (1832), Séraphîta (1835) et La Recherche de l'absolu (1834).

 

Les Scènes de la vie privée, qui inaugurent la catégorie des « études de mœurs », commencent avec Gobseck (1830) et La Femme de trente ans (1831). La construction de « l'édifice », dont il expose le plan dès 1832 à sa famille avec un enthousiasme fébrile, se poursuit avec les scènes de la vie parisienne dont fait partie Le Colonel Chabert (1832-1835). Il aborde en même temps les scènes de la vie de province avec Le Curé de Tours (1832) et Eugénie Grandet (1833), ainsi que les scènes de la vie de campagne avec Le Médecin de campagne (1833), dans lequel il expose un système économique et social de type saint-simonien.

 

Ainsi commence « le grand dessein » qui, loin d’être une simple juxtaposition d’œuvres compilées a posteriori, se développe instinctivement au fur et à mesure de ses écrits. Il envisage le plan d'une œuvre immense, qu'il compare à une cathédrale. L’ensemble doit être organisé pour embrasser du regard toute l’époque, tous les milieux sociaux et l'évolution des destinées. Profondément influencé par les théories de Cuvier et de Geoffroy Saint-Hilaire, il part du principe qu'il existe « des Espèces Sociales comme il y a des Espèces Zoologiques » et que les premières sont beaucoup plus variées que les secondes, car « les habitudes, les vêtements, les paroles, les demeures d’un prince, d’un banquier, d’un artiste, d’un bourgeois, d’un prêtre et d’un pauvre sont entièrement dissemblables et changent au gré des civilisations. » Il en résulte que la somme romanesque qu'il envisage doit « avoir une triple forme : les hommes, les femmes et les choses, c’est-à-dire les personnes et la représentation matérielle qu’ils donnent de leur pensée ; enfin l’homme et la vie. »

 

Le Père Goriot est à la base de la  onstruction de son œuvre, car Balzac a alors l'idée du retour des personnages, qui est une caractéristique majeure de La Comédie humaine. L'œuvre n'a pu prendre corps qu'avec l'idée de ce retour. Elle est étroitement liée à l'idée d'un cycle romanesque « faisant concurrence à l’état civil ». Ainsi, un personnage qui avait joué un rôle central dans un roman peut reparaître dans un autre quelques années plus tard comme personnage secondaire, tout en étant présenté sous un nouveau jour, exactement comme, dans la vie, des gens que nous avons connus peuvent disparaître longtemps de nos relations pour ensuite refaire surface. Le roman arrive ainsi à restituer « la part de mystère qui subsiste dans chaque vie et dans tout être. Dans la vie aussi, rien ne se termine. » De même, anticipant la vogue des « préquelles », il peut présenter dans un roman la jeunesse d'une personne qu'on avait rencontrée sous les traits d'une femme mûre dans un roman précédent, telle « l'actrice Florine peinte au milieu de sa vie dans Une fille d'Ève et [que l'on retrouve] à son début dans Illusions perdues ».

 

Une fois le plan élaboré, les publications se succèdent à un rythme accéléré : Le Lys dans la vallée paraît en 1835-1836, puis Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau en 1837, suivi de La Maison Nucingen en 1838, Le Curé de village et Béatrix en 1839, Ursule Mirouët et Une ténébreuse affaire en 1841, La Rabouilleuse en 1842. La rédaction dIllusions perdues s’étend de 1837 à 1843, tandis que celle de Splendeurs et misères des courtisanes va de 1838 à 1847. Paraissent encore deux chefs-d'œuvre : La Cousine Bette 1846 et Le Cousin Pons 1847.

Le plan de l'ouvrage est constamment refait et s'allonge au fil des ans, jusqu'à compter 145 titres en 1845, dont 85 sont déjà écrits. Mais ses forces déclinent et il doit réduire son projet. Au total, La Comédie humaine comptera 90 titres publiés du vivant de l'auteur.

Une passion du détail vrai
Jeune fille au chevet d'un mourant sur un grabat dans un grenier.
 
Illustration tirée de La Cousine Bette

« Enfin, toutes les horreurs que les romanciers croient inventer sont toujours au-dessous de la vérité. »

Le Colonel Chabert

Doté du génie de l'observation, Balzac attache une grande importance à la documentation et décrit avec précision les lieux de ses intrigues, n'hésitant pas à se rendre sur place pour mieux s'imprégner de l'atmosphère, ou interrogeant des personnes originaires d'une ville qui joue un rôle dans son récit. Il a un sens aigu du détail vrai et son style devient jubilatoire dès qu'il s'agit de décrire. C'est pour cela que les personnages prennent tellement de place dans son œuvre et qu'il ne pouvait pas rivaliser avec Eugène Sue dans le roman-feuilleton. Il décrit minutieusement une rue, l'extérieur d'une maison, la topographie d'une ville, la démarche d'un personnage, les nuances de la voix et du regard. Il est à la fois scénographe, costumier et régisseur : « Balzac, par sa gestion si particulière de l'espace et du temps, a inventé l'écriture cinématographique. » Les minutieuses descriptions de l’ameublement d’une maison, d'une collection d'antiquités, des costumes des personnages jusque dans les moindres détails — passementerie, étoffes, teintes — sont celles d’un scénographe, voire d'un cinéaste. L’auteur de La Comédie humaine plante ses décors avec un soin presque maniaque, ce qui explique l’engouement des metteurs en scène pour ses textes, souvent adaptés à l’écran (voir Films basés sur l'œuvre d'Honoré de Balzac). Il accorde un même soin à décrire le fonctionnement d'une prison76, les rouages de l'administration, la mécanique judiciaire, les techniques de spéculation boursière, les plus-values que procure un monopole ou une soirée à l'opéra et les effets de la musique.

 

Par cet ensemble de romans et nouvelles, Balzac se veut un témoin de son siècle, dont il dresse un état des lieux pour les générations futures. Il s'attache à des réalités de la vie quotidienne qui étaient ignorées par les auteurs classiques. Grâce à la précision et à la richesse de ses observations, La Comédie humaine a aujourd'hui valeur de témoignage socio-historique et permet de suivre la montée de la bourgeoisie française de 1815 à 1848.

 

Pour cette raison, on a vu en lui un auteur réaliste, alors que le génie balzacien excède une catégorie réductrice que dénonçait déjà Baudelaire :

« J'ai maintes fois été étonné que la grande gloire de Balzac fût de passer pour un observateur ; il m'avait toujours semblé que son principal mérite était d'être visionnaire, et visionnaire passionné. Tous ses personnages sont doués de l'ardeur vitale dont il était animé lui-même. Depuis le sommet de l'aristocratie jusqu'aux bas-fonds de la plèbe, tous les acteurs de sa Comédie sont plus âpres à la vie, plus actifs et rusés dans la lutte, plus patients dans le malheur, plus goulus dans la jouissance, plus angéliques dans le dévouement, que la comédie du vrai monde ne nous les montre. Bref, chacun, chez Balzac, même les portières, a du génie. »

 

Baudelaire reconnaît toutefois au romancier un « goût prodigieux du détail, qui tient à une ambition immodérée de tout voir, de tout faire voir, de tout deviner, de tout faire deviner ». Nombre de critiques ont salué « une imagination débordante et d'une richesse infinie, l'imagination créatrice la plus fertile et la plus dense qui ait jamais existé depuis Shakespeare ». En poussant la précision du détail jusqu'à l'hyperbole, le réalisme balzacien devient incandescent et se transforme en vision84. Certains récits relèvent de la veine fantastique tandis que d'autres baignent dans une veine mystique et ésotérique.

 

En plus de faire un portrait de la société, Balzac veut aussi influer sur son siècle, comme il le déclare lors d'une entrevue en 1833. Il veut occuper la première place dans la littérature européenne, à la hauteur des Byron, Scott, Goethe ou Hoffmann.

Liens avec sa propre vie

L’œuvre est indissociable de sa vie, dont les vicissitudes font comprendre ce qui a nourri son « monde ». Il fascine ses contemporains par ses bagues, sa canne à pommeau d'or, sa loge à l'opéra. Il vit avec une gourmandise insatiable, un appétit « d'argent, de femmes, de gloire, de réputation, de titres, de vins et de fruits ».

 

Il a multiplié déménagements, faillites, dettes, spéculations ruineuses, amours simultanées, emprunts de faux noms, séjours dans des châteaux, que ce soit à Saché ou à Frapesle, et a fréquenté tous les milieux sociaux. L'accès à l'aisance financière —« Avoir ou n’avoir pas de rentes, telle était la question, a dit Shackspeare »— est la motivation majeure de la plupart des mariages dans ses romans —comme ce le fut pour lui. Il montre un auteur poursuivi pour n'avoir pas livré à temps un manuscrit promis à son éditeur, tout comme cela lui est arrivé à lui-même. Alors qu'il a dû se cacher longtemps dans un appartement secret pour échapper à ses créanciers, en inventant mille stratagèmes (voir ci-dessous « Rue des Batailles »), il met en scène un détective privé qui gagne sa vie en s'emparant de débiteurs insaisissables. À l'époque où, muni de l'argent que lui a confié Mme Hańska, il court les antiquaires à la recherche de tableaux et d'objets d'art pour meubler fastueusement leur demeure commune (voir ci-dessous « La Folie Beaujon ou le dernier palais », il dessine le personnage du cousin Pons, un collectionneur passionné qui « pendant ses courses à travers Paris, avait trouvé pour dix francs ce qui se paye aujourd’hui mille à douze cents francs » et avait ainsi amassé une collection exceptionnelle.

 

Par leur psychologie, plusieurs personnages sont intimement liés à la personnalité de Balzac et apparaissent comme des doubles de leur créateur. On peut voir une part de lui dans les personnages de Séraphîta, Louis Lambert, La Fille aux yeux d'or et Mémoires de deux jeunes mariées. On le reconnaît aussi dans le narrateur de Facino Cane et surtout en Lucien de Rubempré, dont la trajectoire, qui s'étend sur ses deux plus grands romans (Illusions perdues et Splendeurs et misères des courtisanes), comporte de nombreux points communs avec la sienne : même début dans la poésie, même liaison de jeune homme avec une femme mariée, même ambition littéraire, même désir de quitter la province pour percer à Paris, etc. Tout comme Lucien se donne un titre de noblesse et des armoiries, Balzac a ajouté une particule nobiliaire à son nom et a fait peindre des armoiries sur la calèche qu'il avait louée pour aller rencontrer Mme Hańska à Vienne. (Voir la section Les doubles).

Style et méthode de travail
Enfants dansant une ronde autour de deux personnages fantastiques.
 
Illustration des Contes drolatiques par Gustave Doré

Voir la section correspondante dans l'article sur La Comédie humaine.

 

Il a presque toujours plusieurs ouvrages en chantier, étant à même de puiser dans sa galerie de personnages pour les intégrer à une intrigue et répondre à la demande d'un éditeur qui lui demande une nouvelle. Décrivant la méthode de travail de Balzac, André Maurois imagine que des centaines de romans flottent sur ses pensées « comme des truites dans un vivier, le besoin venu, il en saisit un. Quelquefois, il n'y réussit pas tout de suite. [...] Si un livre vient mal, Balzac le rejette au vivier. Il passe à autre chose. » Il n'hésite pas à refondre ses textes antérieurs, changeant le titre d'un roman ou des noms de personnages, reprenant un texte d'abord publié sous forme de nouvelle pour l'intégrer dans une suite romanesque. Il élimine aussi dans l'édition définitive la division en chapitres.

 

Très doué pour le pastiche, Balzac imite facilement des écrivains et des voix particulières. Il va volontiers jusqu'à la caricature, comme pour le langage de la concierge du Cousin Pons ou le jargon du banquier Nucingen. Il inscrit dans la trame de ses romans d'innombrables analogies cachées qui en forment l'armature symbolique et contribuent à donner un accent de vérité au réci. Son style, qui a été critiqué pour des fautes de goût dans les premières années, commence à s'élever à force de travail et dénote par la suite une grande maîtrise. Il corrige inlassablement ses épreuves, exigeant parfois qu'elles soient reprises jusqu'à quinze ou seize fois, et retournant à l'imprimeur des pages tellement barbouillées de corrections qu'elles faisaient le désespoir des typographes, mais suscitent maintenant l'admiration.

 

Pour se délasser et servir d'antidote au « sérieux romantique », Balzac travaille aux Contes drolatiques, qu'il rédige en parallèle à ses romans, de 1832 à 1837, s'inspirant de Rabelais et pastichant l'ancien français tout en inventant force néologismes.

Balzac journaliste
Un homme accoudé à une table écoute attentivement un autre jeune homme lisant un livre avec emphase.
 
Daniel d'Arthez met en garde Lucien de Rubempré sur les dangers du journalisme (Illusions perdues).
 
Gargantua. Caricature de Louis-Philippe par Daumier (1831).

 

Le journalisme attire Balzac parce que c'est une façon d'exercer un pouvoir sur la réalité, lui qui rêve parfois de devenir maître du monde littéraire et politique grâce à l'association Le Cheval rouge qu'il voulait créer.

 

En même temps, il est bien conscient des dangers que cette carrière représente pour l'écrivain, parce que, forcé d'écrire sous des contraintes impératives, le journaliste est « une pensée en marche comme le soldat en guerre ». Dans Illusions perdues, il fait dire aux sages du Cénacle, lorsque Lucien de Rubempré annonce qu’il va « se jeter dans les journaux » :

« Gardez-vous en bien, là serait la tombe du beau, du suave Lucien que nous aimons (…). Tu ne résisterais pas à la constante opposition de plaisir et de travail qui se trouve dans la vie des journalistes ; et résister au fond, c’est la vertu. Tu serais si enchanté d’exercer le pouvoir, d’avoir le droit de vie et de mort sur les œuvres de la pensée, que tu serais journaliste en deux mois. »

 

Ailleurs, il revient sur les compromissions auxquelles doit souvent se résoudre le journaliste : « Quiconque a trempé dans le journalisme, ou y trempe encore, est dans la nécessité cruelle de saluer les hommes qu’il méprise, de sourire à son meilleur ennemi, de pactiser avec les plus fétides bassesses, de se salir les doigts en voulant payer ses agresseurs avec leur monnaie. On s’habitue à voir faire le mal, à le laisser passer ; on commence par l’approuver, on finit par le commettre. »

 

Pour sa part, en tant que journaliste, il s'engage dès 1830 dans la défense des intérêts des gens de lettres, affirmant que l'artiste doit bénéficier d'un statut spécial car il constitue une force idéologique, un contre-pouvoir, voire une menace révolutionnaire que le gouvernement a tort de dédaigner, car son génie le place à égalité avec l'homme d'État. Il dénonce le rapport de forces inégal entre une pléthore d'écrivains débutants et la poignée d'éditeurs qui les exploite. Ce combat débouchera sur la création de la Société des gens de lettres (voir section ci-dessous).

 

Il livre aussi un combat, en septembre 1839, pour la révision du procès de Sébastien-Benoît Peytel, un ancien confrère du journal Le Voleur et auteur d'un violent pamphlet contre Louis-Philippe, condamné à mort pour le meurtre de son épouse et de son domestique. Il tente d'en faire une cause nationale, mais sans succès.

 

Outre sa profonde connaissance des milieux du journalisme, il participe aussi, en tant qu'écrivain, à la révolution du roman-feuilleton : en 1836, il livre au journal La Presse de son ami Girardin, La Vieille Fille, qui paraît en douze livraisons. En 1837, il y fera paraître Les Employés ou la Femme supérieure. Dans les années qui suivent, il donnera aussi divers romans au Constitutionnel et au Siècle. À partir de l'automne 1836, presque tous ses romans paraîtront d'abord découpés en tranches quotidiennes dans un journal, avant d'être édités en volumes. Cette formule entraîne une censure de la moindre allusion sexuelle dans le texte livré aux journaux.

La Chronique de Paris
Lithographie du portrait d'un homme assis qui glisse la main gauche dans sa veste
 
François Guizot « est une girouette qui, malgré son incessante mobilité, reste sur le même bâtiment. »

 

En 1835, apprenant que La Chronique de Paris, journal politique et littéraire, feuille sans position politique bien tranchée, est à vendre, Balzac l’achète, avec des fonds qu’il ne possède pas — comme à son habitude. L’entreprise, qui aurait paru dramatique à tout autre, le remplit de joie et il construit aussitôt ses « châteaux en Espagne ». Il veut en faire l'organe du « parti des intelligentiels ».

 

Quand enfin La Chronique de Paris paraît, le 1er janvier 1836, l’équipe comprend des plumes importantes : Victor Hugo, Gustave Planche, Alphonse Karr et Théophile Gautier, dont Balzac apprécie le jeune talent ; pour les illustrations, le journal s'attache les noms de Henry Monnier, Grandville et Honoré Daumier. Balzac se réserve la politique, car le journal est un outil de pouvoir. Il fournira aussi des nouvelles. En réalité, si les membres de la rédaction festoient beaucoup chez Balzac, bien peu d’entre eux tiennent leurs engagements et Balzac est pratiquement le seul à y écrire. Il y publie des textes dont certains se retrouveront plus tard dans La Comédie humaine, mais remaniés cent fois selon son habitude, notamment L'Interdiction, La Messe de l'athée et Facino Cane.

 

Quant aux articles politiques signés de sa main, le ton en est donné par cet extrait paru le 12 mai 1836 : « Ni M. Guizot ni M. Thiers n'ont d'autre idée que celle de nous gouverner. M. Thiers n’a jamais eu qu’une seule pensée : il a toujours songé à M. Thiers (…). M. Guizot est une girouette qui, malgré son incessante mobilité, reste sur le même bâtiment. »

 

Balzac décrit avec une assez juste vision des choses la rivalité entre l'Angleterre et la Russie pour le contrôle de la Méditerranée. Il proteste contre l'alliance de la France et de l'Angleterre et dénonce le manque de plan de la diplomatie française. Enfin, il prophétise la domination de la Prusse sur une Allemagne unifiée. Il publie aussi dans ce journal des romans et des nouvelles.

 

Au début, La Chronique de Paris a un grand succès, et cette entreprise aurait pu être une véritable réussite. Mais Balzac est obligé de livrer, en même temps, à Madame Béchet et Edmond Werdet, les derniers volumes des Études de mœurs. Il a par ailleurs fait faillite dans une affaire chimérique avec son beau-frère Surville. Enfin il se brouille avec Buloz, nouveau propriétaire de la Revue de Paris, qui avait sans doute communiqué des épreuves du Lys dans la vallée pour une publication en Russie par La Revue étrangère. Balzac refuse dès lors de continuer à livrer son texte et il s'ensuit un procèsr ailleurs, il est arrêté par la Garde nationale parce qu'il refuse d'accomplir ses devoirs de soldat-citoyen, et est conduit à la maison d’arrêt, où il passe une semaine avant que l’éditeur Werdet réussisse à l'en faire sortir. S'ensuivent cinq mois pénibles, durant lesquels il avoue son découragement à ses proches : « La vie est trop pesante, je ne vis pas avec plaisir ». Le jugement lui donne toutefois raison contre Buloz, mais il est aussitôt poursuivi pour retard dans la livraison des romans promis à un autre éditeur, la veuve Béchet. Menacé d’être mis en faillite, il décide, en juillet 1836 d’abandonner La Chronique.

 

Les mésaventures qu'il vient de connaître alimenteront la création d'un de ses plus beaux romans, alors en chantier, Illusions perdues, dont la deuxième partie sera « le poème de ses luttes et de ses rêves déçus ».

Revue parisienne
Portrait en buste. Crâne surmonté d'un foulard blanc.
 
Portrait peint d'un homme brun à collier de barbe portant une veste noire
 
Stendhal en 1840.

 

L’expérience ruineuse de La Chronique de Paris aurait dû décourager Balzac à jamais de toute entreprise de presse. Mais en 1840, Armand Dutacq —directeur du grand quotidien Le Siècle et initiateur, avec Émile de Girardin, du roman-feuilleton— lui offre de financer une petite revue mensuelle. Aussitôt Balzac imagine la Revue parisienne, dont Dutacq serait administrateur et avec lequel il partagerait les bénéfices. L’entreprise est censée servir les intérêts du feuilletoniste Balzac à une époque où Alexandre Dumas et Eugène Sue gèrent habilement le genre dans les quotidiens et utilisent au mieux le principe du découpage et du suspense. Balzac se lance alors dans la compétition, tout en rédigeant pratiquement seul pendant trois mois une revue qu’il veut également littéraire et politique. Il ouvre le premier numéro avec Z. Marcas le 25 juillet 1840, nouvelle qui sera intégrée à La Comédie humaine en août 1846 dans les Scènes de la vie politique.

 

Outre ses attaques contre le régime monarchique, la Revue parisienne se distingue par des critiques littéraires assez poussées dans la charge comme dans l’éloge. Parmi ses victimes on compte Henri de Latouche avec lequel Balzac est brouillé et qu’il méprise désormais : « Le véritable roman se réduit à deux cents pages dans lesquelles il y a deux cents événements. Rien ne trahit plus l'impuissance d'un auteur que l'entassement des faits. »

 

Il attaque son vieil ennemi, Sainte-Beuve, et se déchaîne contre son Port-Royal, se vengeant des humiliations passées :

« Monsieur Sainte-Beuve a eu la pétrifiante idée de restaurer le genre ennuyeux. [...] Tantôt l'ennui tombe sur vous, comme parfois vous voyez tomber une pluie fine qui finit par vous percer jusqu'aux os. Les phrases à idées menues, insaisissables pleuvent une à une et attristent l'intelligence qui s'expose à ce français humide. Tantôt l'ennui saute aux yeux et vous endort avec la puissance du magnétisme, comme en ce pauvre livre qu'il appelle l'histoire de Port-Royal. »

 

Balzac s’en prend encore, çà et là, assez injustement, à Eugène Sue, mais rend un hommage vibrant à La Chartreuse de Parme de Stendhal, à une époque où, d’un commun accord, la presse ignorait complètement cet écrivain :

« Monsieur Stendhal a écrit un livre où le sublime éclate de chapitre en chapitre. Il a produit, à l’âge où les hommes trouvent rarement des sujets grandioses, et après avoir écrit une vingtaine de volumes extrêmement spirituels, une œuvre qui ne peut être appréciée que par les âmes et les gens supérieurs (…). »

 

Il publie aussi un article intitulé « Sur les ouvriers », dans lequel il se rapproche des idées de Fourier. Mais cela marque le dernier numéro de la Revue parisienne, qui s’éteindra après la troisième parution, le 25 septembre 1840. Balzac et Dutacq partageront les pertes qui n’étaient d’ailleurs pas très lourdes. Cependant, une fois encore, Balzac a échoué dans la presse, et dans les affaires.

Monographie de la presse parisienne

Dans cette monographie humoristique (1843), Balzac propose une analyse complète des composantes de la presse. On trouve dans ce pamphlet la définition du publiciste, du journaliste, du « faiseur d'articles de fond », du « pêcheur à la ligne » (le pigiste payé à la ligne), du « rienologue » : « Vulgarisateur, alias : homo papaver, nécessairement sans aucune variété (…), qui étend une idée d’idée dans un baquet de lieux communs, et débite mécaniquement cette effroyable mixtion philosophico-littéraire dans des feuilles continues. » Balzac sait se montrer désinvolte dans la satire, mais celle-ci lui vaudra une froide réception dans les milieux journalistiques.

La préface par Gérard de Nerval est dans le même ton. Dans un style pince-sans-rire, celui-ci donne une définition du canard : « information fabriquée colportée par des feuilles satiriques et d’où est né le mot argot « canard » pour désigner un journal ».

Un forçat littéraire
 
Lorsqu'il s'installe dans la maison de la rue Cassini, Balzac place sur la cheminée une statuette de Napoléon et colle sur la base un papier où est écrit : « Ce qu'il a entrepris par l'épée, je l'accomplirai par la plume.»

« Il faut que la pensée ruisselle de ma tête comme l'eau d'une fontaine. Je n'y conçois rien moi-même. »

BalzacBalzac était un écrivain d'une fécondité prodigieuse, il pouvait écrire vite, beaucoup et inlassablement. Ainsi, c’est en une seule nuit, chez son amie Zulma Carraud à La Poudrerie d’Angoulême, qu’il écrivit La Grenadière : « La Grenadière, cette jolie perle, fut écrite en jouant au billard. Il quittait le jeu, me priant de l’excuser, et griffonnait sur un coin de table, puis revenait à la partie pour la quitter bientôt. »

 

Même s'il avait une constitution apparemment robuste — « col d'athlète ou de taureau (...) Balzac, dans toute la force de l'âge présentait les signes d'une santé violente » —, il malmena sa santé par un régime épuisant, consacrant de seize à dix-huit heures par jour à l'écriture, et parfois même vingt heures quotidiennes  Dès 1831, il confiait à son amie Zulma : « Je vis sous le plus dur des despotismes : celui qu'on se fait à soi-même estime que la volonté doit être un sujet d'orgueil plus que le talent : « il n’existe pas de grand talent sans une grande volonté. Ces deux forces jumelles sont nécessaires à la construction de l’immense édifice d’une gloire. Les hommes d’élite maintiennent leur cerveau dans les conditions de la production, comme jadis un preux avait ses armes toujours en état139. »

 

Selon Stefan Zweig, la production littéraire de Balzac durant les années 1830-1831 est pratiquement sans équivalent dans les annales de la littérature : le romancier doit avoir écrit une moyenne de seize pages imprimées par jour, sans compter les corrections sur épreuves. Pour cela, il travaille surtout la nuit, pour ne pas être dérangé : « J'ai repris la vie de forçat littéraire. Je me lève à minuit et me couche à six heures du soir ; à peine ces dix-huit heures de travail peuvent-elles suffire à mes occupations. » Ou encore : « Quand je n'écris pas mes manuscrits, je pense à mes plans, et quand je ne pense pas à mes plans et ne fais pas de manuscrits, j'ai des épreuves à corriger. Voici ma vie. »

 

Pour soutenir ce rythme, il fait depuis des années une consommation excessive de café, qu'il boit « concassé à la turque » afin de stimuler « sa manufacture d'idées » : « Si on le prend à jeun, ce café enflamme les parois de l'estomac, le tord, le malmène. Dès lors tout s'agite : les idées s'ébranlent comme les bataillons de la Grande Armée sur le terrain d'une bataille, et la bataille a lieu. Les souvenirs arrivent au pas de charge, enseignes déployées ; la cavalerie légère des comparaisons se développe par un magnifique galop ; l'artillerie de la logique accourt avec son train et ses gargousses ; les traits d'esprit arrivent en tirailleurs ; les figures se dressent, le papier se couvre d'encre»

 

Ce régime lui était nécessaire pour parvenir à livrer à son éditeur la centaine de romans devant composer La Comédie humaine, en plus des articles promis aux journaux et revues. À cela s'ajoute aussi l'énorme recueil des Cent Contes drolatiques qu'il rédige entre 1832 et 1837, dans une veine et un style rabelaisiens. Il cherche toujours, par cette production continue, à régler les dettes que son train de vie frénétique et fastueux lui occasionne. Il entretient aussi une importante correspondance et fréquente les salons où il rencontre les modèles de ses personnages.

 

Il a une haute opinion du rôle de l'écrivain et considère sa tâche comme un sacerdoce : « Aujourd'hui l'écrivain a remplacé le prêtre, il a revêtu la chlamyde des martyrs, il souffre mille maux, il prend la lumière sur l'autel et la répand au sein des peuples. Il est prince, il est mendiant. Il console, il maudit, il prophétise. Sa voix ne parcourt pas seulement la nef d'une cathédrale, elle peut quelquefois tonner d'un bout du monde à l'autre

Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie

La Comédie humaine est le titre sous lequel Honoré de Balzac a regroupé un ensemble de plus de 90 ouvrages — romans, nouvelles, contes et essais — de genres réaliste, romantique, fantastique ou philosophique, et dont l’écriture s’échelonne de 1829 à 1850.

Par cette œuvre, Balzac veut faire une « histoire naturelle de la société », explorant de façon systématique les groupes sociaux et les rouages de la société afin de brosser une vaste fresque de son époque susceptible de servir de référence aux générations futures.

 

Il répartit ses récits en trois grands ensembles : Études de mœurs, Études philosophiques et Études analytiques. Le premier est le plus important et se divise lui-même en six sections, explorant divers milieux sociaux et régions de la France. Les ouvrages sont liés entre eux de façon organique par plusieurs centaines de personnages susceptibles de reparaître dans divers romans, à des moments divers de leur existence. Pour assurer l'unité de son œuvre, Balzac corrige et récrit inlassablement nombre de ses ouvrages afin de mieux les fondre dans un plan d'ensemble qui est allé compter jusqu'à 145 titres.

 

Créateur du roman moderne, Balzac veut décrire la totalité du réel et s'intéresse à des réalités jusque-là ignorées en littérature, parce que laides ou vulgaires. Il montre sous ses diverses formes la montée du capitalisme et la toute-puissance de l'argent, menant à la disparition de la noblesse et à la dissolution des liens sociaux. Le titre a été choisi en référence à la Divine Comédie de Dante. Mais au lieu d'une entreprise théologique, l'auteur s'est voulu sociologue et a créé un univers non manichéen, où l'amour et l'amitié tiennent une grande place, et qui met en lumière la complexité des êtres et la profonde immoralité d'une mécanique sociale où les faibles sont écrasés tandis que triomphent le banquier véreux et le politicien vénal.

 

Doué du génie de l'observation, Balzac a créé des types humains saisissants de vérité. Certains de ses personnages sont tellement vivants qu'ils sont devenus des archétypes, tels Rastignac, le jeune provincial ambitieux, Grandet, l'avare tyran domestique, ou le père Goriot, icône de la paternité. Il accorde une place importante aux financiers et aux notaires, mais aussi au personnage de Vautrin, le hors-la-loi aux identités multiples. Son œuvre compte une importante proportion de courtisanes et de grisettes, à côté de femmes admirables et angéliques. L'importance qu'il donne à celles-ci et à leur psychologie lui a valu très tôt un lectorat féminin enthousiaste.

 

En dépit de l'opposition de l'Église, cette œuvre est devenue très vite un phénomène d'imprimerie et obtient un immense retentissement en France et en Europe, influençant profondément le genre du roman. Traduite en de nombreuses langues, elle est encore rééditée aujourd'hui et a souvent fait l'objet d'adaptations au cinéma et à la télévision.

 

 

 

 

Genèse

 
Honoré de Balzac d'après un tableau de Louis Boulanger.

Après avoir pendant sept ans espéré faire fortune en produisant des ouvrages de littérature marchande — romans sentimentaux situés dans un cadre pseudo-historique et aux intrigues bourrées d'invraisemblances — qu'il signait sous des pseudonymes, Balzac s'oriente vers un nouveau genre de roman. Le tournant commence avec Les Chouans (1829), dont il soigne particulièrement le cadre géographique et historique, étant soucieux de vérité au point d'aller vivre deux mois chez un militaire à la retraite, le général de Pommereul, à proximité du théâtre de ce récit. Il s'attache ensuite à explorer les ressorts psychologiques qui sont à la base des événements sociaux. Avec La Peau de chagrin (1831), sa renommée commence à s'étendre au-delà des frontières, suscitant l'intérêt de Goethe, qui en discute avec Eckermann à Weimar.

 

Dès ce moment, sa production littéraire se révèle d'une fécondité remarquable, mais l'idée d'intégrer tous ces ouvrages dans une œuvre unique ne lui viendra que plus tard. Après avoir publié plusieurs romans sous le titre général de Scènes de la vie privée, il a l'idée, en juillet 1833, d'ajouter les Scènes de la vie de province, puis les Scènes de la vie parisienne et les Scènes de la vie de campagne, formant ainsi quatre ensembles qui seraient regroupés sous le titre Études de mœurs au XIXe siècle siècle. Enthousiasmé par son projet, il accourt alors chez sa sœur, dont il était très proche, en s'écriant : « Saluez-moi, car je suis tout bonnement en train de devenir un génie. ». Et il déroule son plan en faisant les cent pas dans son salon.

 

Ce n'est toutefois qu’en 1834 que lui vient l'idée de relier entre eux ces récits de façon organique, en réutilisant des personnages de récits précédents, faisant alors réapparaître dans Le Père Goriot l'ambitieux Eugène de Rastignacn 1. Cette décision majeure l'amènera à corriger des ouvrages antérieurs afin de mieux les intégrer au grand projet2.

 

Lors de la publication du Père Goriot, en 1835 , le succès de librairie est à la mesure de ses attentes et le comble de joie : « Le Père Goriot fait fureur ; il n'y a jamais eu tant d'empressement à vouloir lire un livre ; les marchands l'affichent d'avance. Il est vrai que cela est grandiose... »

Une histoire naturelle de la société

 
Page de titre de l'édition originale du Père Goriot (1835). Par la citation de Shakespeare en épigraphe (All is true / « Tout est vrai »), Balzac affirme un choix esthétique fondamental.

 

En 1834, lors de la rédaction du Père Goriot, Balzac éprouve son intuition fondamentale en découvrant qu'il n'y a pas de sujet indigne de la littérature et qu'un auteur doit embrasser la totalité du réel, y compris dans ses détails les plus laids ou les plus bas, toutes les classes sociales pouvant fournir des personnages de roman. Dès lors, il conçoit sa production romanesque comme une exploration systématique des groupes sociaux et des rouages de la société. Poursuivant dans la voie de la réflexion philosophique à laquelle il s'était d'abord intéressé au sortir de l'adolescence, il voit dès lors dans le roman la possibilité de proposer un système explicatif général.

 

Il part du principe qu'il existe « des Espèces Sociales comme il y a des Espèces Zoologiques » et que les premières sont beaucoup plus variées que les secondes, car « les habitudes, les vêtements, les paroles, les demeures d’un prince, d’un banquier, d’un artiste, d’un bourgeois, d’un prêtre et d’un pauvre sont entièrement dissemblables et changent au gré des civilisations. » Il en résulte que la somme romanesque qu'il envisage doit « avoir une triple forme : les hommes, les femmes et les choses, c’est-à-dire les personnes et la représentation matérielle qu’ils donnent de leur pensée ; enfin l’homme et la vie. »

 

Il envisage donc de répartir ses romans en trois grandes sections, ainsi qu'il l'expose dans une lettre de 1834 à Ewelina Hańska : « Je crois qu’en 1838, les trois parties de cette œuvre gigantesque seront, sinon parachevées, du moins superposées et qu’on pourra juger la masse [...]. » Les Études de mœurs offrent l’histoire générale de la société. Elles sont axées sur les passions, qui sont le moteur de l'action humaine : « si la pensée, ou la passion, qui comprend la pensée et le sentiment, est l’élément social, elle en est aussi l’élément destructeur. » Il envisage d'explorer systématiquement tous les aspects de la société et de la vie :

« Les Études de Moeurs représenteront tous les effets sociaux sans que ni une situation de la vie, ni une physionomie, ni un caractère d'homme ou de femme, ni une manière de vivre, ni une profession, ni une zone sociale, ni un pays français, ni quoi que ce soit de l'enfance, de la vieillesse, de l'âge mûr, de la politique, de la justice, de la guerre, ait été oublié. »

« La seconde assise est les Études philosophiques, car après les effets viendront les causes » Au dernier étage, les Études philosophiques, composées de romans, de contes et de nouvelles fantastiques, fourniront la clé permettant de remonter aux causes. Balzac leur accordait une énorme importance et ce n’est pas par hasard si le premier grand succès lui arriva avec La Peau de chagrin.

 

Grâce à ce procédé de construction romanesque inédit, Balzac peut embrasser la totalité du monde dans un même projet, satisfaisant « l'obsession du tout, qui travaille son imaginaire ». Le plan se complète et s'amplifie au fil des ans. En 1839, il dit vouloir écrire « l'histoire des mœurs contemporaines. Ça formera 40 volumes. Ce sera une espèce de Buffon12. » La référence à l'auteur de L’Histoire naturelle n'est pas gratuite, car Balzac veut appliquer au domaine moral les principes d'unité du vivant mis au jour par Buffon et Cuvier : « Il existe une anatomie comparée morale, comme une anatomie comparée physique. Pour l'âme, comme pour le corps, un détail mène logiquement à l'ensemble. »

 

Il se documente avec un soin extrême sur les époques et les milieux dont il traite, et fait de nombreux voyages pour visiter les lieux où il place son action, étant convaincu que « les grands conteurs sont des colosses d'érudition » ; loin de considérer ses ouvrages comme une lecture de divertissement, il veut faire une « contribution à la connaissance et à la compréhension d'une époque. » Pour décrire le milieu de la pègre et les opérations de la police dans Splendeurs et misères des courtisanes, il lit les mémoires de Vidocq et ceux de Fouché. Il dépouille aussi des ouvrages de sociologie sur le monde de la prostitution. Pour ses nouvelles sur la musique (Gambara et Massimilla Doni), il étudie la musique avec un maître, tout comme il a étudié la chimie pour écrire La Recherche de l'absolu.

 

La documentation, toutefois, n'est pas sa seule source et il a souvent affirmé que les génies possèdent un don de seconde vue qui leur permet de « deviner la vérité dans toutes les situations possibles (...) de faire venir l'univers dans leur cerveau ».

 

De 40 volumes en 1839, le plan monte à 145 titres en 1845, dont 85 sont déjà écrits. En 1847, toutefois, sentant ses forces décliner, il réduit ce plan à 137 ouvrages, dont 87 sont considérés comme achevés tandis que 50 restent à faire. Par la suite, il retranchera encore plusieurs sujets et déplacera des titres dans la série18. Au total, La Comédie humaine comptera 90 titres publiés du vivant de l'auteur4.

 

Le grand projet étant interrompu par la mort, l'auteur laissera de nombreux projets à l'état d'ébauches. Trois ouvrages seront publiés à titre posthume : Les Paysans, resté inachevé et publié en 1855 par Évelyne de Balzac, Le Député d'Arcis et Les Petits Bourgeois de Paris, tous deux terminés par Charles Rabou, selon la promesse qu’il avait faite à Balzac peu avant sa mort, et publiés respectivement en 1854 et en 1856.

 

L'auteur tenait absolument à ce que la publication des romans et nouvelles composant La Comédie humaine respecte son plan d'ensemble. En effet, chaque titre porte un numéro dans le catalogue général.

Homme en buste peint de face sur fond sombre. Veste noire et gilet jaune. Cheveux blonds. Yeux bleus au regard intense.
 
Portrait de Walter Scott en 1822

D'abord intitulé Études sociales, ou Œuvres complètes, ce n'est qu'en 1842, lors de la signature du contrat pour la publication de ses œuvres réunies, que l'ensemble prendra comme titre définitif La Comédie humaine, en référence à la Divine Comédie de Dante. Balzac mentionne ce titre pour la première fois dans une lettre datant probablement de janvier 1840. À la structure théologique adoptée par le poète médiéval fait place une structure sociologique. Ce titre l'enthousiasme et plaît à ses éditeurs. Ceux-ci exigent toutefois aussi une préface justifiant ce titre et montrant l'unité de l'ensemble. Après avoir vainement sollicité Charles Nodier puis George Sand pour cette préface, Balzac finit par se résoudre à l'écrire lui-même et y consacre autant de travail qu'à un récit complet. Dans cet Avant-propos, il explique qu'il a voulu faire mieux que Walter Scott :

« Walter Scott élevait donc à la valeur philosophique de l’histoire le roman […] il y réunissait à la fois le drame, le dialogue, le portrait, le paysage, la description ; il y faisait entrer le merveilleux et le vrai […] Mais […] il n’avait pas songé à relier ses compositions l’une à l’autre de manière à coordonner une histoire complète, dont chaque chapitre eût été un roman, et chaque roman une époque. »

Il a ainsi développé la complexité du monde qu'il portait en lui dès 1832 et dresse un bilan dans une lettre enthousiaste à Mme Hańska : « Quatre hommes auront eu une vie immense : Napoléon, Cuvier, O’Connell, et je veux être le quatrième. Le premier a vécu la vie de l’Europe, il s’est inoculé des armées ! Le second a épousé le globe ! Le troisième s’est incarné dans un peuple ! Moi, j’aurai porté une société tout entière dans ma tête ! »

Balzac attribue au romancier une responsabilité majeure dans la sphère publique : « La loi de l’écrivain, ce qui le fait tel, ce qui, je ne crains pas de le dire, le rend égal et peut-être supérieur à l’homme d’État, est une décision quelconque sur les choses humaines, un dévouement absolu à des principes. ».

Avec le temps, l'entreprise gagne en grandeur et se détache de la sentimentalité qui imprégnait encore par endroits les premiers romans. Plus grandit l'amertume de Balzac, plus son écriture se risque à dévoiler l'envers du décor, abordant le sujet de la perversion sexuelle dans La Rabouilleuse, révélant les intrigues politico-policières dans Une ténébreuse affaire, montrant dans Illusions perdues et Splendeurs et misères des courtisanes la vanité des salons aristocratiques et la façon dont le monde de la littérature est lié à celui de la finance. Par la suite, après quelques ouvrages secondaires dans lesquels il semble avoir perdu son élan, il revient en force avec deux chefs-d'œuvre, Le Cousin Pons et La Cousine Bette.

Caractéristiques

Un nouveau genre de roman

Comme le font observer les frères Goncourt, « Le roman, depuis Balzac, n'a plus rien de commun avec ce que nos pères entendaient par ce roman. » De fait, un journal révolutionnaire faisait, en 1795, un constat assez sombre sur l'état du roman français : « Nous n'avons en français guère de romans estimables ; ce genre n'a pas été assez encouragé ; il a trouvé trop peu de lecteurs, les auteurs ne travaillaient que pour la classe nobiliaire (...) De là résultaient des peintures de ridicules plutôt que de passions ; des miniatures plutôt que des tableaux (...) on y trouvait peu de vérité, peu de ces traits qui, appartenant à tous les hommes sont faits pour être reconnus et sentis par tous. »

 

Cette exigence nouvelle de vérité tardera toutefois à se faire entendre. Encore en 1820, les romans à la mode qui circulent dans les cabinets de lecture « ne vont guère dans le sens d'une vérité plus exacte et plus générale » : ils visent seulement à procurer une évasion selon une formule stéréotypée, en mettant en scène un héros dont la situation sociale n'est jamais précisée et qui mène une vie irréelle.

 

La situation change avec Balzac. Très tôt, celui-ci prend conscience des possibilités du roman, dans lequel il voit un sommet de l'art : « Le roman, qui veut le sentiment, le style et l’image, est la création moderne la plus immense. » Créateur du roman moderne, il a couvert tous les genres — conte, nouvelle, essai, étude — et a touché à divers registres : fantastique et philosophique avec La Peau de chagrin, réaliste avec Le Père Goriot, mais romantique avec Le Lys dans la vallée. Il a produit une œuvre qui a servi de référence à son siècle et au siècle suivant, et donné ses lettres de noblesse au roman.

 

L'idée de créer un cycle romanesque dont l'unité serait assurée par le retour de nombreux personnages d'un roman à un autre a ouvert une voie que de nombreux auteurs reprendront par la suite. Il a créé un « univers non manichéen », où l'amour et l'amitié tiennent une grande place, et qui met en lumière à la fois la complexité des êtres et la profonde immoralité d'une mécanique sociale où les faibles sont écrasés tandis que triomphent le banquier véreux et le politicien vénal.

Un réalisme visionnaire

Balzac était bien conscient de la révolution qu'il apportait dans l'art du roman, avec des personnages pris dans le vif de la société et un souci de vérité inconnu jusqu'alors. Pour lui, « un roman est plus vrai que l'Histoire12 » et « les détails seuls constituent désormais le mérite des ouvrages improprement appelés romans. » Doué d'une extraordinaire puissance d'observation, don qu'il estimait être le propre du génie, il décrit avec précision les divers aspects du réel, qu'il s'agisse des techniques de spéculation boursière, des plus-values que procure un monopole, du salon d'une demi-mondaine, d'une cellule de prison, de la démarche d'un capitaliste de province, du regard d'une mère sur son enfant ou de l'accoutrement d'une tenancière de pension. Il s'attache avec un soin extrême à des détails qui étaient ignorés par les auteurs classiques. Grâce à la précision et à la richesse de ses observations, La Comédie humaine a aujourd'hui valeur de témoignage socio-historique et permet de suivre la montée de la bourgeoisie française de 1815 à 1848.

Tête d'un bronze en pied
 

Ce souci du détail lui a valu d'être étiqueté comme un auteur réaliste, ce dont s'étonnait Baudelaire :

« J'ai maintes fois été étonné que la grande gloire de Balzac fût de passer pour un observateur ; il m'avait toujours semblé que son principal mérite était d'être visionnaire, et visionnaire passionné. Tous ses personnages sont doués de l'ardeur vitale dont il était animé lui-même. Depuis le sommet de l'aristocratie jusqu'aux bas-fonds de la plèbe, tous les acteurs de sa Comédie sont plus âpres à la vie, plus actifs et rusés dans la lutte, plus patients dans le malheur, plus goulus dans la jouissance, plus angéliques dans le dévouement, que la comédie du vrai monde ne nous les montre. Bref, chacun, chez Balzac, même les portières, a du génie. »

Cette opinion est également celle de Bernard Pingaud, pour qui le roman balzacien ne ressemble guère à l’amalgame de plat réalisme et de romanesque qu’on a pu accoler à ce nom. Tout en rappelant ce que les décors et les personnages de Balzac doivent à une observation minutieuse du réel, André Maurois insiste sur le fait que cette réalité est transmutée dans les moments d'extase et de « surexcitation cérébrale » de la création, de sorte que le réalisme devient visionnaire. Nombre de critiques ont salué « une imagination débordante et d'une richesse infinie, l'imagination créatrice la plus fertile et la plus dense qui ait jamais existé depuis Shakespeare ».

Pour Albert Béguin, « il ne s'agit nullement de peindre la réalité courante, mais au contraire d'en pousser tous les détails à l'hyperbole, de contraindre un spectacle quotidien à se métamorphoser en vision. » Cette faculté de visionnaire « permet à Balzac de donner au monde de l'expérience commune le relief saisissant d'une hallucination ou d'une fantasmagorie. » On peut en juger par cette description d'une tireuse de cartes :

« C’était une face desséchée où brillaient deux yeux gris d’une immobilité fatigante ; un nez rentré, barbouillé de tabac ; des osselets très-bien montés par des muscles assez ressemblants, et qui, sous prétexte d’être des mains, battaient nonchalamment des cartes, comme une machine dont le mouvement va s’arrêter. Le corps, une espèce de manche à balai, décemment couvert d’une robe, jouissait des avantages de la nature morte, il ne remuait point. »

Balzac, qui « a réservé une place de choix aux êtres d'exception, aux hors-la-loi, aux hommes de génie, aux grands vaincus et aux courtisanes », évoque lui-même dans une lettre la part que joue son imagination dans la création de ses personnages et des sentiments qu'il leur prête : « l'observation ne serait-elle qu'une sorte de mémoire propre à aider cette mobile imagination ? » À un critique qui lui reprochait de mettre en scène des caractères exceptionnels, il répond que ses romans auraient été illisibles s'il avait laissé à ses personnages « la place réelle qu'occupent dans l'état social les honnêtes gens dont la vie est sans drame43 ».

Tout comme Hugo, il avait l'ambition de révéler les secrets de la société, et d'affirmer ainsi sa maîtrise sur le monde, car « le visible est impénétrable à l'œil du profane, mais pour l'œil averti, l'invisible est la clé du visible. » Cette poétique du secret et de l'énigme se double de « dispositifs voyeuristes » qui procurent au lecteur la jouissance de pouvoir regarder sans être vu, qu'il s'agisse d'une mystérieuse activité observée par le trou d'une serrure, d'une personne élégante qu'on voit entrer dans une maison louche ou, cas le plus fréquent, de la vision à son insu d'une femme désirée. Par extension, ce thème touche aussi à la passion de Balzac pour le masque et le travestissement.

Une veine fantastique
 
Extrait de La Peau de chagrin exposant les propriétés fantastiques de cette peau.
Un jeune homme tiré par les cheveux est entraîné par un squelette tandis que des jeunes femmes dansent à l'arrière-plan.
 
Dessin de la couverture de La peau de chagrin, Paris, Delloye, 1838.

Balzac est fortement influencé par Hoffmann qu’il est le premier à faire paraître dans la Revue de Paris en 1829. Il rend hommage à l’écrivain allemand qu’il admire « parce qu’il refuse le classicisme bourgeois et la littérature roucoulante des ex-censeurs de l’Empire ». L'influence d’Hoffmann est d’ailleurs décelable dans plusieurs de ses contes philosophiques. Ainsi Maître Cornélius, publié en 1831 dans la Revue de Paris, doit quelque chose à Mademoiselle de Scudéry qu’Henri de Latouche avait traduit en se l'appropriant sous le titre Olivier Brusson dès 1824. Mais, bientôt, la publication massive en traduction des contes d’Hoffmann et l'effet de mode qui en découle détournent Balzac d'un genre qu’il estime galvaudé. Dans un article paru dans La Caricature le 16 février 1832, il sait gré aux auteurs des Contes bruns (Philarète Chasles et Charles Rabou), de n’avoir pas utilisé le mot « fantastique » : « programme malsain d’un genre qu’on a déjà trop usé par l’abus du nom seulement »6.

 

Il a d'abord repris des thèmes classiques : L'Élixir de longue vie (1830) est une variation sur le mythe de Don Juan, tandis que Melmoth réconcilié reprend le mythe de Faust. Avec La Peau de chagrin, Balzac invente un fantastique nouveau pour son époque, car son récit prend soin de maintenir l'ambiguïté sur l'origine des événements qui surviennent au héros, en les faisant coïncider avec des causes naturelles. Ceux-ci semblent ainsi être l'effet d'un hasard plutôt que de l'action d'une peau véritablement magique. Ainsi, à peine Raphaël a-t-il formulé le désir d'une orgie qu'il croise des amis qui l'entraînent chez un banquier désireux de fonder une revue et de régaler ses futurs rédacteurs. Le lien avec la peau existe cependant et est suggéré avec habileté, son rétrécissement étant bien réel. Échappant ainsi à l'action directe d'un objet magique, le fantastique se nourrit du réel et tient à la nature des situations, des lieux et des personnages. Ce faisant, Balzac dessille les yeux du lecteur et l’oblige à regarder mieux ce qui est. C’est par le fantastique que son réalisme atteint au « surréel » philosophique.

 

Par la suite, Balzac se détache encore davantage du fantastique gothique pour s'attacher au fantastique qui peut jaillir de situations bien réelles mais perçues par un enfant qui n'en comprend pas le sens : « je n’ai jamais plus retrouvé nulle part, ni chez les mourants, ni chez les vivants, la pâleur de certains yeux gris, l’effrayante vivacité de quelques yeux noirs. Enfin ni Maturin ni Hoffmann, les deux plus sinistres imaginations de ce temps, ne m’ont causé l’épouvante que me causèrent les mouvements automatiques de ces corps busqués. [...]. »

Une veine mystique et ésotérique
 
Illustration de la couverture de Séraphîta

Le mysticisme qui imprègne les Études philosophiques — Louis Lambert, Les Proscrits, Jésus-Christ en Flandre, Séraphîta, La Recherche de l'absolu, Ursule Mirouët — mêle les influences du voyant suédois Swedenborg, du théologien danois luthérien Hans Lassen Martensen, et du médecin allemand Franz-Anton Mesmer, théoricien du magnétisme animal. Balzac fait du swedenborgisme sa religion et estime que celle-ci peut sauver le monde.

Convaincu de la profonde unité de la nature, il cherche constamment à relier monde spirituel et matériel, qui ne sont que deux aspects d'une même réalité. Adepte du transformisme, il trouve dans les ouvrages du mystique suédois ample confirmation d'une philosophie unitaire qu'il avait déjà développée au contact des théories de Cuvier et de Geoffroy Saint-Hilaire : « Je trouve que s'il y a quelque plan digne du sien [Dieu], ce sont les transformations humaines faisant marcher l'être vers des zones inconnues. C'est la loi des créations qui nous sont inférieures: ce doit être la loi des créations supérieures. »

 

Tout comme la physiognomonie lui a appris que l'apparence extérieure révèle la personnalité cachée, de même est-il persuadé que des êtres exceptionnels peuvent atteindre un niveau de voyance qui leur permet de « voir les choses du monde matériel aussi bien que celles du monde spirituel dans leurs ramifications originelles et conséquentielles », ainsi que l'affirme Louis Lambert. De même, Séraphitus « possède cette vue intérieure qui pénètre tout ».

 

Il est possible d'accéder à cet état de voyance grâce au rêve et au somnambulisme magnétique. Dans Séraphîta, l'héroïne impose les mains sur le front de Wilfrid pour « provoquer en lui le rêve qui la révélera telle qu'elle est et fera comprendre au jeune homme la destinée de l'humanité9 ». Par le rêve, l'esprit peut s'élever aux réalités les plus hautes et apercevoir « la sphère où la Méditation entraîne le savant, où la Prière transporte l’âme religieuse, où la Vision emmène un artiste ». L'esprit peut alors « s'isoler complètement du milieu dans lequel il réside » et franchir des distances infinies à la vitesse de l'éclair.

 

À la différence du mystique, toutefois, qui veut disparaître dans la contemplation de Dieu, Balzac cherche plutôt à posséder le monde, à acquérir la puissance et « ravir à Dieu son secret ». C'était là le propre de Prométhée, comme l'a vu Maurois, qui a choisi cette figure mythique comme titre de sa biographie de Balzac.

Les personnages

Lors de la conception de sa « cathédrale » littéraire, Balzac estimait qu'il lui faudrait créer trois à quatre mille personnages pour représenter le drame qui se joue dans une Société. Par la suite, il réduit quelque peu ce nombre : « deux ou trois mille figures saillantes d’une époque, car telle est, en définitif, la somme des types que présente chaque génération et que La Comédie humaine comportera. » L'auteur n'était pas loin du compte, car le chiffre précis est de 2 472 personnages. Un nombre considérable de ceux-ci — 573 précisément — réapparaissent, ne fût-ce que furtivement, dans plusieurs romans, les records en la matière étant détenus par le financier Nucingen (31 ouvrages), le médecin Bianchon (29), le dandy de Marsay (27) et l'ambitieux au cœur sec Rastignac (25) En outre, Balzac a eu l'idée de lier ses personnages « les uns aux autres par un ciment social de hiérarchies et de professions »

 

Voir les articles Types de personnages de la Comédie humaine et Liste des personnages de la Comédie humaine.

Le retour des personnages
Portrait en buste. Crâne surmonté d'un foulard blanc.
 
Sainte-Beuve, le grand critique du temps, n'aimait pas Balzac. Il lui reproche notamment de faire reparaître des personnages d'un roman à un autre.

Le philosophe Alain a défini la Comédie humaine comme un « carrefour où les personnages se rencontrent, se saluent, et passent. De là vient qu'au lieu d'être dans un roman, on est dans dix. » Pour François Mauriac, c'est un « rond-point (..) d'où partent les grandes avenues que Balzac a tracées dans sa forêt d'hommes. »

 

Les figures principales du monde balzacien correspondent à des types humains que l’on verra reparaître souvent, formant des portraits de groupes dans un chassé-croisé savant de financiers, de médecins, de politiciens et de courtisanes ou de femmes du monde. Toutefois, la fréquence des réapparitions et le nombre de romans dans lesquels sont cités ces personnages, ne correspondent pas toujours à leur importance réelle. Ainsi des personnages majeurs comme Jean-Joachim Goriot, le cousin Pons, la cousine Bette, César Birotteau, Coralie ou Esther Gobseck sont les protagonistes d'un seul roman et ne réapparaissent guère, ou seulement sous forme d'évocation.

Le principe de ces « personnages reparaissants » a été vivement critiqué par Sainte-Beuve :

« Les acteurs qui reviennent dans ces nouvelles ont déjà figuré, et trop d'une fois pour la plupart, dans des romans précédents de M. de Balzac. Quand ce seraient des personnages intéressants et vrais, je crois que les reproduire ainsi est une idée fausse et contraire au mystère qui s'attache toujours au roman. Un peu de fuite en perspective fait bien. (...) Presque autant vaudrait, dans un drame, nous donner la biographie détaillée, passée et future, de chacun des comparses. Grâce à cette multitude de biographies secondaires qui se prolongent, reviennent et s'entrecroisent sans cesse, la série des Études de mœurs de M. de Balzac finit par ressembler à l'inextricable lacis des corridors de certaines mines ou catacombes. On s'y perd et l'on n'en revient plus, ou, si l'on en revient, on n'en rapporte rien de distinct. »

Ce n'était pas l'avis de Félix Davin qui avait compris l'importance de ce principe dès 1835, dans son introduction aux Études de mœurs : « l'une des plus hardies inventions de l'auteur (est) de donner la vie et le mouvement à tout un monde fictif dont les personnages subsisteront peut-être encore, alors que la plus grande partie des modèles seront morts et oubliés ». Marcel Proust y verra également une touche sublime, qui donne à l'œuvre une profonde unité71.

Gravure représentant deux hommes qui discutent en marchant dans une cour sous un arbre.
 
Rastignac et Vautrin dans la cour de la pension Vauquer (Le Père Goriot).

De fait, la réapparition des personnages constitue un élément capital de La Comédie humaine, même si, la plupart du temps, un personnage ne joue un rôle important que dans un seul roman — tels Rastignac dans Le Père Goriot ou De Marsay dans La Fille aux yeux d'or —, et que certains personnages sont toujours secondaires, quoique apparaissant souvent, tel le docteur Bianchon. Cela n'enlève rien à l'efficacité du procédé, car « un personnage reparaissant (...) apparaît moins comme personnage que comme signe ou comme indice (étant) pris dans un réseau avec d'autres personnages. » En raison de sa forte caractérisation, le personnage représente en effet presque toujours un ensemble social : Rastignac évolue dans la sphère du pouvoir et des salons aristocratiques, Nucingen est associé au milieu de la banque et Bianchon évoque la maladie et son traitement.

 

Pour assurer l'unité de son œuvre, Balzac n'hésite pas à remanier des romans antérieurs, faisant disparaître d'anciens personnages ou donnant un nom à un personnage jusqu'alors resté anonyme, afin d'assurer le plus de cohérence et de vérité possible à La Comédie humaine, qu'il voyait comme un tout. Ses retouches maniaques et ses inspirations du moment lui font changer titres et noms des protagonistes à mesure que paraissent les œuvre.

 

L’auteur trouve des cousinages spontanés à ses personnages et revient en arrière selon une technique que Marcel Proust appelait « l’éclairage rétrospectif » : le passé d’un personnage n’est révélé que longtemps après sa présentation, ce qui lui donne un souffle de vie et un supplément de mystère. Ainsi, Jacques Collin, apparu dans Le Père Goriot, se précise sous le nom de l’abbé Carlos Herrera dans Splendeurs et misères des courtisanes. La vicomtesse de Beauséant— dont on voit le triste échec dans La Femme abandonnée— aura été une séductrice tout au long de La Comédie humaine. La princesse de Cadignan, aussi appelée Diane de Maufrigneuse dans Les Secrets de la princesse de Cadignan, ne cesse d’être précisée, montrée sous tous les angles, même sous celui d'une générosité inattendue dans Le Cabinet des Antiques. Mais Balzac s'écarte parfois de la cohérence chronologique de ses personnages. En dépit de l'extraordinaire maîtrise de l'auteur sur sa création, manier une telle quantité de personnages en les faisant reparaître dans des romans situés à différentes époques, devait fatalement engendrer des dizaines de fautes de chronologie, des cas de morts qui ressuscitent, d'enfants posthumes, de changements dans la psychologie, de contradictions physiognomoniques ou de modifications d'état-civil. Conscient du danger, et bien avant l'apparition d'un dictionnaire de ses personnages, Balzac avait établi un modèle de fiche au sujet de Rastignac pour mieux suivre son évolution. Il avait aussi prévu que des lecteurs pourraient souhaiter disposer d'une fiche synthétique représentant le parcours biographique des personnages afin « de se retrouver dans cet immense labyrinthe » que Zola décrit comme une tour de Babel : « Je relis dans la très belle et très complète édition que publie en ce moment la librairie Michel Lévy cette étrange comédie humaine, ce drame vivant (...) c'est comme une tour de Babel que la main de l'architecte n'a pas eu et n'aurait jamais eu le temps de terminer. »

Des types sociaux
Les deux jeunes gens sont dessinés assis à une table sous une tonnelle. Daniel s'appuie du coude et écoute Lucien lire son livre.
 
Assis au bord d'une cheminée dans un salon, un curé cause avec une dame richement habillée.
 
Madame de Listomère et le curé Troubert dans Le Curé de Tours

 

La Comédie humaine ne fait pas seulement « concurrence à l’état civil » comme le souhaitait l’auteur, car Balzac, théoriquement partisan d’une société divisée en classes immuables, n’aime que les personnages qui ont un destin. L’être balzacien par excellence est celui de l’excès. Tous ceux auxquels l’auteur s’est visiblement attaché sont des révoltés, — tels Calyste du Guénic dans Béatrix, Lucien de Rubempré dans Illusions perdues—, des hors-la-loi — tels Vautrin et Henri de Marsay dans Histoire des Treize —, ou des bolides humains qui traversent avec violence les étages de la hiérarchie sociale, — tels Eugène de Rastignac, Coralie ou Esther Gobseck dans Illusions perdues et Splendeurs et misères des courtisanes, Birotteau dans César Birotteau, le musicien extravagant Gambara, la femme « emmurée » dans La Grande Bretèche.

« J’aime les êtres exceptionnels, écrit Balzac à George Sand, j’en suis un. Il m’en faut d’ailleurs pour faire ressortir mes êtres vulgaires et je ne les sacrifie jamais sans nécessité. Mais ces êtres vulgaires m’intéressent plus qu’ils ne vous intéressent. Je les grandis, je les idéalise, en sens inverse, dans leur laideur ou leur bêtise. Je donne à leurs difformités des proportions effrayantes ou grotesques. »

 

L’auteur de La Comédie humaine est le plus balzacien de tous ses personnages. Il vit lui-même leur propre vie jusqu’à l'épuisement. Comme Raphaël dans La Peau de chagrin, chacune de ses œuvres lui demande un effort si considérable qu’elle rétrécit inexorablement son existence. Dans Facino Cane, le narrateur fait une confidence qui pourrait bien être celle de Balzac lui-même : « Quitter ses habitudes, devenir un autre que soi par l’ivresse des facultés morales, et jouer ce jeu à volonté, telle était ma distraction. À quoi dois-je ce don ? Est-ce une seconde vue ? Est-ce une de ces qualités dont l’abus mènerait à la folie ? Je n’ai jamais recherché les causes de cette puissance ; je la possède et m’en sers, voilà tout. »

 

Fasciné par la puissance explicative de la physiognomonie et de la phrénologie, alors très en vogue, Balzac se sert de ces théories pour donner un effet de vérité à ses personnages, en faisant coïncider le physique et le moral

« Les lois de la physionomie sont exactes, non seulement dans leur application au caractère, mais encore relativement à la fatalité de l’existence. Il y a des physionomies prophétiques. S’il était possible, et cette statistique vivante importe à la Société, d’avoir un dessin exact de ceux qui périssent sur l’échafaud, la science de Lavater et celle de Gall prouveraient invinciblement qu’il y avait dans la tête de tous ces gens, même chez les innocents, des signes étranges. »

 

Très souvent, le portrait se révèle prophétique et concentre des éléments clés du récit. Ainsi en est-il du criminel dans Le Curé de village: « Un trait de sa physionomie confirmait une assertion de Lavater sur les gens destinés au meurtre, il avait les dents de devant croisées ». Un autre personnage du même roman, également criminel, présentait « des signes de férocité cachée : les dents mal rangées imprimaient à la bouche, dont les lèvres étaient d’un rouge de sang, un tour plein d’ironie et de mauvaise audace ; les pommettes brunes et saillantes offraient je ne sais quoi d’animal. » Pour donner encore plus de force à ses portraits, Balzac met souvent ses personnages en relation avec leur environnement et excelle à démontrer « à quel point le type social est façonné par son milieu ambiant, et adapté à lui, jusqu'à faire pratiquement partie de lui et lui ressembler. » Les exemples sont nombreux :

« Le visage pâle et ridé de la vieille femme était en harmonie avec l’obscurité de la rue et la rouille de la maison. À la voir au repos, sur sa chaise, on eût dit qu’elle tenait à cette maison comme un colimaçon tient à sa coquille brune ; [..] ses grands yeux gris étaient aussi calmes que la rue, et les rides nombreuses de son visage pouvaient se comparer aux crevasses des murs. »

« L'embonpoint blafard de cette petite femme est le produit de cette vie, comme le typhus est la conséquence des exhalaisons d'un hôpital. Son jupon de laine tricotée, qui dépasse sa première jupe faite avec une vieille robe, et dont la ouate s'échappe par les fentes de l'étoffe lézardée, résume le salon, la salle à manger, le jardinet, annonce la cuisine et fait pressentir les pensionnaires. »

Façonné par son milieu, le personnage balzacien se transforme aussi lui-même par une opération active, dynamique, présentant des caractéristiques physiques et des jeux de physionomie qu'il a développés grâce à la profession qu'il exerce : « [Le notaire] s’arrêta en regardant Bartholoméo avec une expression particulière aux gens d’affaires et qui tient le milieu entre la servilité et la familiarité. Habitués à feindre beaucoup d’intérêt pour les personnes auxquelles ils parlent, les notaires finissent par faire contracter à leur figure une grimace qu’ils revêtent et quittent comme leur pallium officiel. »

Procession de dignitaires projetant chacun une ombre cocasse
 
Illustration de Grandville dans le journal satirique La Caricature où écrivait Balzac en 1830.

 

Ces portraits font volontiers appel à des métaphores animales : Henri de Marsay a un courage de lion et une adresse de singe; le redoutable comte Maxime de Trailles a des yeux de faucon, maître Roguin des yeux de lynx, Vautrin des yeux de tigre, tandis que le crétin Chautard a des yeux « semblables à ceux d'un poisson cuit ». Balzac a aussi recours à une onomastique imprégnée de cratylisme animal pour surdéterminer le destin de certains personnages, comme le faisait déjà Sterne dans Tristram Shandy, un roman qu'il admirait89. François Rastier a mis en évidence la cohérence du réseau d'isotopies animales dans La Cousine Bette. Ces comparaisons animalières — recevables à une époque où la fable était encore vivante et où la série des « Ombres portées » de Grandville faisait les délices des lecteurs de La Caricature (voir ci-contre) — relèvent des « codes culturels » balzaciens qui ont le plus vieilli.

 

Toutefois, grâce à l'épaisseur physique et psychologique qu'il donne à ses personnages et à l'empathie qu'il témoigne à leur égard, Balzac a réussi à créer des personnages mémorables, auxquels le lecteur va facilement s'attacher. Ainsi, à la question « Le plus grand chagrin de votre vie ? », Oscar Wilde aurait donné cette réponse : « La mort de Lucien de Rubempré ».

 

La création du personnage balzacien se fait en trois étapes. D’abord, l'auteur part de personnes connues ou de personnages livresques, puis il enrichit le personnage fictionnel d’éléments empruntés à d’autres. Marie d'Agoult sert ainsi de base à Béatrix de Rochefide. Dans la seconde étape, « il est guidé non plus par un désir de transposition littéraire, mais par les exigences intrinsèques à l’œuvre» Comme un peintre prend du recul pour mieux voir son tableau, il ajoute une touche pour donner plus de relief à l’œuvre. Dans la troisième étape, il déforme le personnage comme dans une hallucination pour en faire l’incarnation d’une idée : Gobseck incarnant la puissance de l’or, le père Goriot étant qualifié de « christ de la paternité » et César Birotteau de « martyr de la probité commerciale ». Ses personnages atteignent dès lors un tel niveau de réalité qu'ils sont devenus des types, au même titre que ceux de Shakespeare, dont Taine a rapproché plusieurs de ses figures de scélérats et de monomanes.

Les modèles vivants
Jeune femme vue de profil, tournée vers la gauche, une main sous le menton. Les cheveux sont nattés. Tonalités de brun et or.
 
L'écrivaine Marie d'Agoult a inspiré le personnage de Béatrix. Portrait par Henri Lehmann (1843).
Portrait peint d'un homme moustachu portant une veste sombre et gilet vert
 
Autoportrait au gilet vert, Eugène Delacroix (1837).

 

Comme « peintre de son temps », Balzac a produit, avec La Comédie humaine, une galerie de portraits que l’on a beaucoup cherché à comparer avec les originaux. En effet, son entourage entier a servi de modèle à ses personnages et il s'est lui-même représenté dans de nombreux ouvrages. On le devine sous les traits de Félix de Vandenesse, et encore davantage dans le personnage de Louis Lambert ainsi que dans celui d'Albert Savarus. Si, dans Illusions perdues, on peut reconnaître plusieurs de ses traits chez le jeune poète Lucien de Rubempré, qui ruine sa famille pour impressionner la haute société, le romancier se projette aussi dans le grand écrivain Daniel d'Arthez. Ce dernier, tout en ayant des traits du saint-simonien Philippe Buchez, représente son « moi idéalisé, joignant ce que lui-même désespère de joindre : génie et sagesse, création et longévité ». Les avatars de sa propre existence se retrouvent chez certains de ses personnages préférés : ceux qui arrivent de la province à Paris avec une ambition démesurée (Rastignac), habitent des demeures secrètes (La Fille aux yeux d'or), passent de la ruine à la richesse (Raphaël dans La Peau de chagrin), ou sont grevés de dettes, comme il le sera toute sa vie (Anastasie de Restaud dans Le Père Goriot).

 

La plupart de ses liaisons féminines sont également reconnaissables, de façon transposée. Le personnage de Dinah de La Baudraye dans La Muse du département est inspiré de Caroline Marbouty, qui s'était déguisée en « page » pour voyager avec lui en Italie ; vexée par la vision que l’écrivain donnait d’elle — une pâle imitation de George Sand —, Caroline a publié sous le pseudonyme de Claire Brunne un roman vengeur donnant un portrait peu flatteur de Balzac. Béatrix met en scène un épisode de la vie de Marie d'Agoult (le personnage de Béatrix de Rochefide), qui se mit à haïr Balzac après la parution du roman. Dans le même roman, Franz Liszt a servi de modèle au musicien Conti, amant de la marquise de Rochefide. Cette liaison entre Mme d'Agoult et Liszt avait été révélée à Balzac par une indiscrétion de George Sand.

 

Signe de

Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
Honoré (de) BALZAC (1799-1850) - 1ère partie
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